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L’ÉNÉIDE.


LIVRE SIXIÈME.


Ainsi parlait le héros, les yeux mouillés de larmes ; et sa flotte, volant sur les ondes, touche enfin les rivages de Cumes, antique colonie d’Eubée. La proue s’est tournée vers les flots ; l’ancre, à la dent mordante, affermit les navires, et les poupes recourbées bordent l’humide arène. On s’élance, on foule avec transport ces plages d’Ausonie. L’un fait jaillir des veines d’un caillou le feu qu’elles recèlent. L’autre, interrogeant les forêts, en poursuit les hôtes sauvages, ou montre, plein de joie, les sources qu’il a trouvées.

Cependant le pieux fils d’Anchise s’avance vers la montagne où réside Apollon, et cherche le réduit solitaire de la redoutable Sibylle ; antre immense, où le dieu de Délos agite l’âme de sa prêtresse d’une sainte fureur, et lui découvre l’avenir. Déjà se déploient aux yeux des Troyens les bois sacrés d’Hécate et ses portiques éclatans d’or. Si l’on en croit la renommée, Dédale, fuyant autrefois les états de Minos, osa se confier sur des ailes rapides à l’océan des airs, vogua par des chemins nouveaux vers les glaces de l’Ourse, et s’arrêta dans sa course éthérée sur les hauteurs de Chalcis. À peine rendu à la terre, il te consacra, dieu