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mais il rompt le tissu fragile, dont les nœuds enlaçaient le pied de la colombe, et la retenaient captive au sommet du mât immobile. L’oiseau de Vénus s’envole sur les vents, et fuit dans l’azur des nuages. À l’instant même Eurytion, qui déjà contenait à peine son arc impatient et sa flèche acérée, Eurytion invoque le secours de son frère : son œil suit dans l’espace la colombe joyeuse ; et pendant qu’elle s’y joue d’une aile triomphante, le trait l’atteint sous la nue. L’oiseau s’abat mourant, exhale son dernier souffle dans les plaines de l’air, et tombe avec le dard qui l’a percé.

La palme était conquise, Aceste n’y pouvait plus prétendre ; cependant il décoche un trait dans les cieux, pour signaler son adresse et son arc retentissant. Tout à coup s’offre aux regards un prodige inattendu, présage d’un grand événement : une triste expérience expliqua dans la suite cet avis des dieux, et trop tard l’effroi des devins en interpréta le mystère. La flèche, en volant, s’allume au sein des nuages humides, marque sa route par un sillon de flamme, et s’évapore en fumée dans le vague des airs ; pareille à ces étoiles vagabondes, qui, détachées de la voûte céleste, traversent en courant l’horizon, et traînent après elles une queue flamboyante. À cette vue, le peuple étonné s’incline : Troyens et Siciliens, tous implorent à la fois les dieux. Le magnanime Énée ne craint pas d’accepter l’augure ; il embrasse l’heureux Aceste, le comble de présens magnifiques : « Agréez ces dons, ô mon père, lui dit-il ! par ce signe éclatant, le souverain de l’Olympe