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le secret de la reine christine

— Ne s’agit-il pas de nos fortunes ? Il faut jouer serré. L’affaire du mannequin pouvait d’ailleurs mal tourner. Mais la chance nous a servis. Et maintenant à l’hôtellerie, sans perdre une minute ! Nous avons des dispositions à prendre avant que Sa Majesté n’y amène le chevalier de Dohna.



Christine suivit un instant les deux cavaliers des yeux avant de remonter sur Pepito, calmé mais encore frémissant. Elle demeura un instant silencieuse, laissant flotter les rênes. Puis :

— Pourquoi ces cavaliers sont-ils partis avec tant de hâte ? demanda-t-elle. Ai-je manqué de courtoisie à leur égard ?

— Non point, Mad… Monsieur ! Sans doute étaient-ils pressés, répondit sentencieusement Clairet.

Un instant de silence.

— Ne trouves-tu pas, Clairet, reprit la reine, que ce gentilhomme italien ressemble au comte de la Gardie ? Il a les mêmes yeux bleus frangés de longs cils noirs.

— Ma foi, Monsieur, je ne me suis jamais permis de regarder M. de la Gardie au fond des yeux…

— Pas étonnant qu’y se ressemblent, grogna Jean Holm. La Gardie a beau être général suédois, fils du grand Connétable, il a tout de même dans les veines du satané sang d’étranger !

— Que tu es insupportable, mon pauvre Jean, avec ta perpétuelle mauvaise humeur !

Et plus loin, comme pour elle-même :

— Ses yeux sont un peu plus verts que ceux de Magnus, reprit-elle. Quant à son teint, au lieu d’être vermeil, il est de grain lisse et doré, comme certains vieux marbres.

— Je dirais plutôt, moi, qu’il y a du nègre dans son cas, grommela encore Jean.

Sans daigner lui répondre, Christine éclata tout à coup d’un joyeux rire :

— Enfin, voilà ma première aventure ! s’écria-t-elle.