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le secret de la reine christine

— Magnus, murmura-t-elle.

Mais elle savait en même temps que ce n’était qu’un souvenir. L’étranger la déposa doucement sur la mousse. De son mouchoir parfumé, trempé dans l’eau du ruisseau, il lui tamponnait le front, les tempes.

Les valets accouraient, hors d’haleine.

— Ah ! Madame ! gémissait Jean Holm.

Mais Clairet l’avertit d’un rude coup de poing dans les côtes et il se tut.

— Votre maître n’a rien, fit l’inconnu. Un simple choc. Le coup a porté sur la tête et heureusement le feutre et les cheveux l’ont amorti…

Puis s’adressant à la fois aux deux valets et à l’ami qui tenait par la bride le cheval apaisé :

— C’est ce mannequin blanc, planté là au centre du carrefour, qui aura effrayé l’animal. Il ne doit pas être dressé depuis longtemps, ce petit andalou ?

— Oh ! quelques mois à peine, fit Clairet. Mais cet épouvantail, quel est le fils de pute qui l’a fourré là ?

— Ma foi, Dieu seul le sait… ou le diable ! Peut-être est-ce un signal pour des pèlerins en voyage ou pour les compagnies de bandits qui, dit-on, rôdent par le pays↔

Christine qui avait repris connaissance, continuait ses réflexions :

— Il a la même tournure élégante et dégagée que Magnus il y a sept ans, pensait-elle, et plus svelte encore. Mais, au lieu d’être d’un blond de miel, ses cheveux sont noirs et luisants comme le poil de mon andalou ; quant à cette petite moustache au-dessus de la lèvre, comme elle brille !…

Les regards se tournant alors vers elle, Christine sauta sur ses pieds, se redressa de toute sa hauteur en carrant les épaules et de sa voix la plus virile :

— Il ne me reste plus, Monsieur, fit-elle en souriant, qu’à m’excuser de cette ridicule aventure et surtout à vous remercier de m’en avoir tiré avec tant de présence d’esprit et de courage. Sans vous, j’étais en grand danger d’y laisser la vie !