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moitié de ce siècle. Voici donc (fig. 4) un des cavaliers normands représentés sur la tapisserie de Bayeux. Il faut dire que ce précieux monument ne date pas de l’époque de l’expédition de Guillaume, mais ne remonte guère qu’à la fin du xie siècle, c’est-à-dire à l’époque des expéditions des Normands en Italie, en Sicile et en Orient. Tout porte à croire, d’ailleurs, que l’équipement de ces rudes cavaliers s’était peu modifié pendant le cours du xie siècle. La cotte était ample, mais pas assez pour ne pas suivre les formes du corps ; les manches larges, pour pouvoir être passées facilement, ainsi que les cuisses. On voit sur la poitrine du cavalier le plastron-volet, qui s’ouvrait de haut en bas et permettait de passer le corps par cette ouverture, afin d’enfourcher les cuisses, le camail étant rapporté. Ce camail ne tenait pas au casque, mais s’attachait à la cotte d’armes, et l’on voit, sur la tapisserie de Bayeux, des guerriers qui n’ont sur la tête que ce camail, sans le casque conique avec nasal, que l’on mettait au moment du combat. L’homme, sous la cotte d’armes, est vêtu d’un pourpoint à manches très-probablement de peau ou de toile double piquée ; les jambes sont passées dans des chausses avec ou sans bandelettes[1]. Tous ces cavaliers portent des souliers garnis d’éperons très-relevés au-dessus de la semelle. Ils tiennent des écus longs en forme d’amande, avec système de courroies et guige qui permettait de les passer à l’avant-bras gauche en deux sens et de les suspendre au cou[2]. Assis verticalement sur la selle, leurs jambes sont à peine pliées et portaient presque tout le poids du corps sur les étriers, afin de donner plus de force au coup de lance. L’épée, posée sur la hanche gauche, passait à travers la cotte et était bouclée par-dessous ; sa poignée seule restait apparente sous le coude gauche. A la même époque, les hommes d’armes en France portaient aussi des cottes d’armes composées de fines nattes de cuir posées verticalement sur un fond d’étoffe. On voit un de ces guerriers sculpté sur le linteau de droite de la porte principale de l’église abbatiale de Vézelay[3]. Ce personnage (fig. 5) est vêtu d’une tunique d’étoffe descendant aux genoux, avec manche large fendue de quelques centimètres, couvrant le bras droit, et manche juste au poignet, couvrant le bras gauche. La figure 5 bis montre la manche droite. La manche gauche était serrée, afin de ne

v. — 10
  1. Seuls sur la tapisserie de Bayeux, les chefs, et entre autres Guillaume, ont les jambes armées de la même manière que la cotte, c’est-à-dire de chausses couvertes d’anneaux de métal.
  2. Voyez Écu.
  3. 1100 environ.