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Pucelle print son estandart ouquel estoit empainturé Dieu en sa majesté, et de l’austre costé l’image de Nostre-Dame[1]. » — « Et y estoit la ditte Jehanne la Pucelle, laquelle tenoist son estandart en sa main (au sacre du roi)[2]. » Il est dit, dans le Petit Traictié par manière de croniques, sur le siège d’Orléans, que c’était le roi Charles VII qui avait fait faire l’étendard remis à la Pucelle. « Et voulut et ordonna qu’elle eust un estandart, auquel par le vouloir d’elle on feist peindre et mectre pour devise : Juesus Maria, et une magesté[3] »

Il paraîtrait que Jeanne Darc changeait parfois d’étendard, suivant les circonstances, car plus loin, dans la même chronique, il est dit qu’elle entra à Orléans armée de toutes pièces, montée sur un cheval blanc : « Et faisoit porter devant elle son estandart, qui estoit pareillement blanc, ouquel avoit deux anges tenans chacun une fleur de liz en leur main ; et au panon estoit paincte comme une Annonciation (c’est l’image de Nostre-Dame ayant devant elle ung ange luy présentant un liz[4]). » Cet étendard de Jeanne la Pucelle était à queue, car, à l’assaut du boulevard des Tournelles, elle dit à un gentilhomme étant près d’elle : « Donnez-vous garde, quant la queue de mon estandart sera ou touchera contre le boulevert. Lequel luy dist ung peu aprez : — Jeanne, la queue y touche ! Et lors elle luy respondit : — Tout est vostre, et y entrez[5]! »

Dans le Journal de Paris, attribué faussement à un bourgeois, mais rédigé par un membre de l’Université fort hostile à Jeanne Darc, on lit que la Pucelle portait un étendard où était écrit seulement le nom de Jésus. Enfin le chroniqueur allemand Eberhard de Windecken, trésorier de l’empereur Sigismond, et qui recueillit des documents sur la Pucelle, s’exprime ainsi au sujet de son étendard : « La jeune fille marchait avec une bannière qui était faite de soie blanche, et sur laquelle était peint Notre-Seigneur Dieu, assis sur l’arc-en-ciel, montrant ses plaies, et ayant de chaque côté un ange qui tenait un lis à la main[6]. »

La bannière servait aussi, en France du moins, de protection dès

  1. Témoign. des chroniqueurs et hist. du xve siècle : Procès de Jeanne Darc, publ. par J. Quicherat, t. IV, p. 12.
  2. Ibid., p. 77.
  3. Ibid., p. 129.
  4. Ibid., p. 152.
  5. Ibid., p. 161.
  6. Ibid., p. 490.