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salade avec bavière. Cet habillement de guerre féminin ne nous parait pas être une fantaisie du miniaturiste, mais conserver un caractère de réalité qu’on ne trouve pas dans les représentations purement imaginaires. Il est évident que Jeanne Darc ne voulait pas qu’on la confondît avec ces dames guerrières qui, sans trop médire, étaient plus renommées par leur bravoure que par la rigidité de leurs mœurs.

Nous arrivons au moment où l’armure de fer devient correcte. La belle période du harnais de fer battu, en France, est comprise entre les années 1430 et 1460. Légèreté relative, souplesse, exécution irréprochable, formes élégantes et bien appropriées au corps ; toutes les qualités se rencontrent dans ces babillements de guerre. La figure 47 montre les derniers tâtonnements[1]. Le corselet se compose, comme ceux des exemples précédents, du plastron, de la pansière et de la dossière. Dans cet exemple, les tassettes sont remplacées par une jupe de brigantine, c’est-à-dire faite de lames d’acier à recouvrement, rivées entre deux étoffes, l’une qui fait parement extérieur et qui est de soie épaisse ou velours, l’autre qui fait doublure et qui est de peau ou de forte toile en double. Les deux spallières diffèrent, celle de droite entaillée au droit de l’aisselle, et celle de gauche couvrant bien le défaut. Les garde-bras remplacent les cubitières et sont solidaires des arrière-bras et avant-bras, auxquels ils sont attachés par des rivets et lanières de cuir. Les gantelets sont séparés des avant-bras. Le harnais de jambes se compose d’un garde-cuisse d’une seule pièce avec partie postérieure articulée. Les genouillères sont armées, à leur partie externe, de belles gardes. Les grèves sont complètes, doublées sous les genouillères, avec molletières à charnières descendant jusqu’aux talons ; les solerets, articulés, sont attachés aux grèves, et passent sous les extrémités inférieures des molletières, avec lesquelles ils s’assemblent au moyen de boutons à ressort. Nous donnons deux habillements de tête différents. L’un, A, est une salade sans visière mobile, mais avec couvre-nuque articulé. Le cou et le menton sont protégés par une bavière attachée au corselet. L’autre, B, est un bacinet avec gorgerin attaché de même au corselet par des courroies. L’une devant, l’autre derrière. Ce bacinet, dont le profil est donné en C, est très-simple. Il se compose d’un tymbre avec mentonnière s’ouvrant latéralement et visière qu’on ne peut lever, mais qu’on supprime ou qu’on fait tourner de côté en enlevant une

  1. Manuscr. Biblioth. nation., Destruction de la ville de Troyes (sic), français (1425 à 1430).