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[ LANDIER ]
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Saint-Marc de Venise, on voit encore, suspendue à la coupole de la nef, une croix de cuivre qui paraît remonter au XIIIe siècle, et qui servait de luminaire les jours fériés. Les bras de cette croix lumineuse sont doubles et se coupent à angles droits, ainsi que l’indique la figure 7. Les godets contenant l’huile se trouvaient suspendus entre les branches de ce lampier, au moyen de chaînettes.

La croix illuminée est une fort ancienne tradition dont on retrouve la trace dans des manuscrits carlovingiens[1], et beaucoup plus anciennement dans les peintures des catacombes de Rome[2]. Nous devons mentionner aussi les lampes que l’on plaçait sur les tombeaux élevés à l’extérieur des églises. Cet usage était usité chez les chrétiens de Syrie dès le IVe siècle ; nous le retrouvons adopté chez les Occidentaux jusqu’à la fin du XVIe siècle. Le nombre de renseignements précis qu’il est possible de recueillir encore sur les lampiers, si communs dans nos églises pendant le moyen âge, indique assez l’importance de ce meuble, le luxe avec lequel il était traité, la richesse des matières employées. Il est certain que les orfèvres de cette époque avaient déployé, dans la fabrication de ces objets, toute leur habileté, ce goût parfait qui distingue leurs œuvres ; employant à la fois le cuivre doré, le vermeil, les fines dentelures, le cristal, les émaux, ils avaient su donner aux grandes couronnes de lumières un aspect éblouissant qui représentait aux yeux des fidèles, les jours de fête, l’image de la Jérusalem céleste. Ces grands cercles lumineux complétaient l’éclairage des chœurs garnis de râteliers, de nombreux candélabres, de flambeaux autour de l’autel, de cierges sur les tombeaux.

LANDIER, s. m. (chenet). Les cheminées, dans les habitations du moyen âge, étaient larges et hautes. Généralement un homme pouvait y entrer debout sans se baisser, et dix ou douze personnes se plaçaient facilement autour de l’âtre[3]. Il fallait, à l’intérieur de ces cheminées, de forts chenets de fer, désignés alors sous le nom de landiers, pour supporter les bûches énormes que l’on jetait sur le foyer et les empêcher de rouler dans l’appartement. Il y avait les landiers de cuisine et les landiers d’appartement. Les premiers étaient assez compliqués comme forme, car ils étaient destinés à plusieurs

usages. Leur tige était munie de supports ou crochets pour recevoir

  1. Voyez la Bible d’Alcuin, Brit. Mus.
  2. Voyez Roma subterranea, tab. secund. cœmeterii Potiani via Portuensi, une croix peinte sur les bras de laquelle sont posés deux flambeaux.
  3. Voyez l’article Cheminée dans le Dictionnaire raisonné d’architecture.