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et l’os étaient, pendant toute la période romane, souvent employés dans la composition des siéges, des tables, et des meubles à la portée de la main ; ces matières étaient tournées, gravées de dessins délicats que l’on remplissait d’une matière noire, rouge ou verte, ou bien posées en placages également gravés, et collés ou cloués sur une carcasse de bois. C’est d’après ces données que nous supposons que la forme (fig. 1) est fabriquée. Les montants de face, les appuis et les pieds sont en partie composés de morceaux d’ivoire et de plaques gravés et niellés. L’appui est une marqueterie d’ivoire, de bois et de morceaux de métal ; un tapis sans coussins couvre la tablette servant de siège. Une marche de bois, plaquée d’ouvrages de marqueterie, est, suivant l’usage, placée en avant du siège. Toutes les salles intérieures des palais, des monastères et des habitations privées, à cette époque, étant toujours carrelées ou dallées, il était nécessaire de disposer sous les pieds des personnes assises un parquet tenant au siège.

Les formes romanes ou de la période ogivale conservent un aspect sévère, une sorte de rigidité que nous ne trouvons pas dans les autres siège : c’est que les formes étaient destinées, dans l’ordre religieux ou civil, à des personnes remplissant de graves devoirs, pendant l’accomplissement desquels il était convenable de garder une posture décente. Nous voyons ces meubles garnis de tapis le plus souvent sans coussins. Les dossiers sont droits, les appuis disposés plutôt pour servir de séparation que d’accoudoirs. Vers la fin du XIIe siècle, les dossiers prirent plus de hauteur, et plus tard encore, ils furent souvent surmontés de dais. Nous trouvons dans quelques manuscrits des formes qui semblent avoir été disposées pour que les assesseurs du personnage principal ne puissent converser entre eux pendant la séance.

Nous donnons (fig. 2) un de ces siège[1]. La forme centrale est élevée de deux marches et placée en avant des formes secondaires ; ces dernières sont comme autant de niches de bois carrées, complètement séparées les unes des autres par des cloisons pleines. On comprend qu’une pareille disposition ne permettait aux assesseurs ou auditeurs aucune distraction ; mais aussi devaient-ils s’endormir volontiers dans leur compartiment, pour peu que la cause ou la discussion se prolongeât.

S’il nous reste en France un assez grand nombre de formes fixes ou stalles, nous n’en possédons pas de mobiles, composées d’un grand nombre de siège. Celles que l’on voit dans quelques musées

  1. Le Romuleon, manuscr. no 6984, Biblioth. nat., XVe siècle.