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commotions terrestres qui, à plusieurs reprises, causèrent des accidents à certains édifices de cette ville. Nous n’avons pu vérifier le fait de ce réseau d’arcs doublant la calotte à caissons ; seule l’indication de Piranesi peut fournir un renseignement. Mais certaines dispositions du tambour de l’édifice ne nous laissent guère de doutes à cet égard. En effet, si l’on jette les yeux sur la figure 4, on voit que ce tambour (voy. le huitième du plan en A) présente une suite de parties pleines et de vides qui coïncident avec les points d’appui et les niches inférieures formant aujourd’hui chapelles. Sachant que les Romains, dans leurs constructions, ne font jamais rien qui ne soit motivé, on ne pourrait comprendre pourquoi ces contre-forts T ont été ainsi réservés, s’ils ne devaient pas contribuer d’une manière efficace au maintien de la coupole. Ces contre-forts T ne sont pas disposés au droit des nerfs des caissons ; ils ont une fonction distincte ; fonction expliquée par le réseau d’enveloppe que représente la figure 6. Pour former ce réseau, la calotte à caissons servait de cintrage, et il suffisait de cerces de bois légères pour bander les arcs appuyés sur l’extrados de cette calotte. Ces arcs bandés, il n’y avait plus qu’à garnir les intervalles avec une maçonnerie (blocage) de matériaux légers, ainsi qu’il est indiqué en B sur la figure 6.

L’économie des cintres préoccupait si fort les constructeurs romains, que même lorsqu’ils ont fait des voûtes en pierre appareillées, d’une assez grande largeur (ce qui est rare), comme par exemple dans le monument de Nîmes connu sous le nom des Bains de Diane, ils ont posé des arcs-doubleaux sur cintres, et ces arcs-doubleaux ont eux-mêmes servi de cintres pour poser de grandes dalles entre eux, comme on pose des couchis. Notre figure 7 explique ce genre de construction de voûtes. Dans ce dernier cas, les constructeurs ont fait l’économie de tous les couchis de bois, puisque les épaisses dalles de pierre reposent chacune de leurs extrémités sur les arcs-doubleaux. Il est évident, donc, que dans la construction de leurs voûtes, les Romains ont économisé, autant que faire se pouvait, la matière et le temps, par conséquent n’ont jamais fait de dépenses inutiles. On cite à peine un ou deux exemples de voûtes d’arête avec coupes appareillées dans tous les édifices de la Rome antique. Par ce même motif d’économie, ont-ils évité les pénétrations, les arrière-voussures, les pendentifs d’appareil, dont nos architectes modernes qui prétendent avoir étudié l’architecture antique pour en tirer un profit, se montrent si prodigues, au grand dommage de nos finances[1].

  1. Un jeune ingénieur français, M. Choisy, va publier prochainement un travail très-complet sur la structure des voûtes romaines, d’après les monuments. Ce recueil, que nous avons eu entre les mains, donne en détail les divers procédés employés par ces grands constructeurs, et démontre, de la manière la plus évidente, que l’économie dans la dépense était une de leurs principales préoccupations. Nous engageons les architectes qui veulent sérieusement connaître les procédés employés par les Romains dans les constructions à recourir aux travaux de M. Choisy sur cette matière.