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[triforium]
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grâce à l’application du système de voûtes d’arête en arcs d’ogive, tout nouveau alors[1]. Cependant ces fenêtres supérieures, très-élevées au-dessus du pavé de l’église, n’éclairaient guère que les voûtes ; les fenêtres percées dans le mur du triforium (voy. la coupe en P) étaient trop éloignées de la claire-voie pour pouvoir donner de la lumière à l’intérieur du vaisseau sur le sol ; d’autant que ce triforium est bas, profond et que le bahut fait écran. L’architecte du chœur de Notre-Dame de Paris adopta résolûment un autre parti ; comme nous venons de le dire, il supprima le bahut et éleva la voûte du triforium. Le maître qui, peu après, vers 1195, construisit la nef de la même église, améliora encore, au point de vue de l’introduction de la lumière dans la partie centrale du vaisseau, les dispositions prises par son devancier. Il construisit les voûtes du triforium transversalement rampantes, afin de démasquer complètement les fenêtres de cette galerie pour le public qui se tenait sur le pavé de la nef. À l’article Cathédrale (fig. 2, 3 et 4), nous rendons compte de cette disposition, assez clairement pour qu’il ne soit pas nécessaire d’y revenir ici. À Notre-Dame de Paris, des roses remplacent les fenêtres rectangulaires, qui, dans l’église de Saint-Germer, sont ouvertes dans le mur auquel le comble en appentis est adossé. Le passage de service intérieur qui, à Saint-Germer, surmonte ces fenêtres, n’existe pas à Paris, mais il existe à la cathédrale de Noyon[2] ; et là, comme dans le croisillon semi-circulaire de la cathédrale de Soissons, c’est un deuxième triforium, ou galerie étroite avec claire-voie en façon d’arcature, qui remplace les roses et les fenêtres rectangulaires[3].

Ces larges triforiums voûtés étaient d’une construction dispendieuse et ne pouvaient convenir qu’à d’assez grands édifices. Ils exigeaient, pour trouver des fenêtres dans les tympans des voûtes hautes, une sur-élévation des murs, afin d’adosser les combles en appentis qui couvraient les galeries de premier étage. Leur utilité ne se faisait sentir que lors des grandes solennités, et encore les deux ou trois premiers rangs de fidèles pouvaient, de ces galeries, voir ce qui se passait dans l’église, si toutefois, comme à Notre-Dame de Paris, à Mantes, à Saint-Remi de Reims, les bahuts de pierre étaient supprimés. Pour des églises bâties avec plus d’économie et dans lesquelles il n’y avait pas d’occasion de recevoir un grand concours de fidèles, le triforium voûté ne pouvait faire partie du programme. Aussi des églises qui datent de la même époque que celles désignées ci-dessus, et qui appartiennent à la même

  1. Voyez Construction, Ogive, Travée, Voûte.
  2. Voyez Travée, fig. 5.
  3. Voyez à l’article Architecture Religieuse, la vue perspective du beau triforium voûté du bras de croix sud de la cathédrale de Soisson. Voyez aussi, à l’article Construction, fig. 41 et 43, la disposition du triforium du chœur de l’église Notre-Dame de Châlons-sur-Marne.