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[triforium]
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bleaux, qui naît au-dessus de ces fenêtres, contre-bute la voûte centrale en berceau, renforcée d’arcs-doubleaux. C’est le système adopté dans les églises auvergnates, mais plus développé[1].

Le développement du triforium dans l’église de Saint-Sernin de Toulouse ne permettait pas cependant d’ouvrir des jours directs dans la nef. Sous le climat du Midi, ce moyen pouvait suffire ; mais, sous le ciel brumeux du Nord, la lumière transmise par ces seconds jours n’éclairait qu’à peine les nefs hautes : il fallait que des fenêtres s’ouvrissent directement sur ces nefs au-dessus du triforium. Aussi, dans les provinces situées au nord de la Loire, on ne cessa point de pratiquer des ouvertures directes sous les charpentes, et, quand on renonça aux charpentes, sous les voûtes qui durent les remplacer. Ce fut une des causes qui empêchèrent les architectes du Nord d’adopter la voûte en berceau (voy. Voûte ), et qui les contraignirent à chercher des combinaisons de voûtes d’arête. Les tympans sous les formerets des voûtes permettaient, en effet, d’ouvrir des baies dans la hauteur même de ces voûtes. Toutefois on ne renonçait point au triforium voûté, qui était regardé comme un moyen propre à maintenir les murs des hautes nefs dans le plan vertical, et à contre-buter les voûtes qui les surmontaient. Plusieurs églises de l’époque de transition nous montrent les diverses tentatives faites en ce sens par les maîtres des provinces françaises du Nord. Nous citerons en première ligne l’église abbatiale de Saint-Germer (Oise), dont la construction remonte à la moitié du XIIe siècle[2]. Les travées du chœur de cette église possèdent, au-dessus du collatéral, un triforium voûté à la romaine, sans arcs ogives. Cette galerie s’ouvre sur l’église par une arcature, et le comble qui la surmonte recouvre des arcs-boutants destinés à maintenir la poussée des voûtes hautes.

La coupe (fig. 4) faite sur cette galerie explique le système de structure adopté. Les demi-pignons AB qui s’élèvent sur les arcs-boutants servaient aussi à porter la couverture, qui se composait d’un solivage avec demi-fermes dans les parties circulaires. Des baies C sont percées sous ce comble en appentis, et donnent dans l’église, au-dessous d’un étroit passage de service ménagé en D, afin de faciliter l’entretien des verrières des fenêtres supérieures F.

La figure 5 donne l’élévation intérieure de ce triforium, avec les fenêtres quadrangulaires E du comble et le passage de service G[3]. En H, est

  1. Voyez à l’article Proportion , fig. 2, la coupe transversale de l’église de Saint-Sernin de Toulouse. Voyez aussi les Archives des monuments historiques, publiées sous les auspices du ministre des Beaux-Arts.
  2. L’église abbatiale de Saint-Germer est, comme structure, en retard sur l’église abbatiale de Saint-Denis, et sur les cathédrales de Noyon, de Senlis et de Paris ; elle appartient à une école moins avancée, qui tient encore par bien des points au système roman : c’est pour cela que nous la mettons ici en première ligne, sinon par la date (car elle ne fut élevée qu’en 1160), mais par le style.
  3. Voyez, dans les Archives des monuments historiques, la Monographie de Saint-Germer, par M. Bœswilwald.