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au-dessus de cette pile se lie à la partie inférieure. En effet, la colonne engagée C (côté de la nef) porte une autre colonne d’un diamètre un peu plus faible et deux colonnettes D qui monteront jusqu’aux voûtes hautes pour recevoir l’arc-doubleau F et les arcs ogives H. La colonne engagée K porte l’archivolte longitudinale, dont la largeur est K′K″, et au-dessus se découpe la pile LMN du triforium avec sa colonnette 0, puis le jambage de la fenêtre supérieure UU′U″ enveloppée par le formeret de la voûte haute dont la colonnette est en I. La colonne engagée P porte l’arc-doubleau Q ; au-dessus, la pile postérieure du triforium R se reliant au mur de clôture du passage intérieur SS′. Sur la pile se détache la colonne T″ adossée au contre-fort avec passage extérieur. Les arcs ogives des voûtes des collatéraux se rangent en V, leur trace sur le tailloir étant en V′[1]. Le progrès sur l’exemple précédent est très-sensible. Tous ces membres ont leur place, ne se gênent plus réciproquement : aussi, à Notre-Dame de Reims, la stabilité est parfaite, l’effet clair, l’aspect rassurant. Les conséquences logiques du principe devaient cependant être poussées plus loin encore.

En 1231 furent commencés les travaux de reconstruction de la nef de l’église abbatiale de Saint-Denis. L’architecte chargé de cette reconstruction est resté inconnu, ainsi que la plupart des maîtres des œuvres de cette époque. Mais l’édifice qu’il nous a laissé indique dans toutes ses parties une sûreté et une perfection rares dans l’art du trait.

Prenons, ainsi que nous venons de le faire pour les cathédrales de Paris et de Reims, une des piles de la nef, et voyons comment les divers étages de la construction viennent se poser sur cette pile. Les dernières traces de la colonne cylindrique centrale qui s’accorde si peu avec les divers membres des voûtes sont effacées ; les arcs de ces voûtes commandent absolument la forme de la pile. Les archivoltes longitudinales se composent, suivant l’usage, de deux rangs de claveaux[2] ; les arcs-doubleaux des voûtes du collatéral qui reçoivent les dallages des terrasses sont composés d’un même nombre de claveaux ; puis il faut la place des arcs ogives. Les voûtes hautes se composent d’un arc-doubleau, ne portant que les remplissages, et n’ayant qu’un seul rang de claveaux de 33 centimètres de largeur, de deux arcs ogives et de deux formerets qui sertissent les meneaux des fenêtres. La position nécessaire de ces membres de voûtes donne rigoureusement la forme et le nombre des membres de la pile. En effet (fig. 4), l’arc-doubleau des voûtes du collatéral comprend les deux membres a et b ; l’archivolte longitudinale, les deux mêmes membres a′ et b′ ; l’arc ogive le membre c. L’arc-doubleau des voûtes hautes se compose du membre d, et

  1. Pour bien saisir la place et la fonction de tous ces membres, il est nécessaire de recourir à la figure 14 de l’article Cathédrale.
  2. Voyez Architecture Religieuse, fig. 36. Cette gravure trace, en perspective, la coupe de la nef de l’église abbatiale de Saint-Denis.