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taient pour défendre un territoire appartenant à un même suzerain ou à des seigneurs alliés en vue d’une défense commune, fait qui se présentait souvent. La fréquence des luttes entre châtelains n’empêchait point qu’ils ne se réunissent, à un moment donné, contre un envahisseur ; et ce fait s’est présenté notamment lors du voyage de saint Louis dans la vallée du Rhône pour se rendre à Aigues-Mortes. Ce prince réduisit les petites forteresses qui commandaient le fleuve, et dont les possesseurs se défendirent tous contre son corps d’armée, bien que ces châtelains fussent perpétuellement en guerre les uns avec les autres.

Pour ne parler que d’une contrée qui a conservé un grand nombre de restes féodaux, le Valois, on remarquera que les postes militaires étaient disposés en vue d’une défense commune au besoin, bien avant la suzeraineté de Louis d’Orléans, et que ce prince ne fit qu’améliorer et compléter une situation stratégique déjà forte.

Le Valois était borné au nord-ouest et au nord par les cours de l’Oise, de l’Aisne et de la Vesle, au sud-est par la rivière d’Ourcq, au sud par la Marne. Il n’était largement ouvert que du côté de Paris, au sud-ouest, de Gesvres à Creil. Or, le château de Montépilloy est placé en vedette entre ces deux points, sur la route de Paris passant par Senlis ; il s’appuyait sur le château de Nanteuil-le-Haudouin, sur la route de Paris à Villers-Cotterets, et qui se reliait au château de Gesvres, sur l’Ourcq. C’était une première ligne de défense couvrant les frontières les plus ouvertes du duché. En arrière, était une seconde ligne de places s’appuyant à l’Oise et suivant le petit cours d’eau de l’Automne : Verberie, Béthisy, Crespy, Vez, Villers-Cotterets, la Ferté-Milon sur l’Ourcq, et Louvry au delà. Derrière ces deux lignes, Louis d’Orléans établit, comme réduit seigneurial, la place de Pierrefonds, dans une excellente position. Des tours isolées furent élevées ou d’anciens châteaux augmentés sur les bords de l’Aisne et de l’Ourcq. Le passage de la Champagne en Valois, entre ces deux rivières, était commandé par les châteaux d’Ouchy, sur l’Ourcq, et de Braisne, sur la Vesle, couverts par la forêt de Daule.

Au nord, en dehors du Valois, dans le Vermandois, Louis d’Orléans avait acheté et restauré la place de Coucy, qui couvrait le cours de l’Aisne. Tous ces châteaux (Coucy excepté) étaient mis en communication par les vues directes qu’ils avaient les uns sur les autres au moyen de ces hautes tours, ou par des postes intermédiaires. C’est ainsi, par exemple, que le château de Pierrefonds était mis en communication de signaux avec celui de Villers-Cotterets par la grosse tour de Réalmont, dont on voit encore les restes sur le point culminant de la forêt de Villers-Cotterets.

Les expéditions tentées par Louis d’Orléans, et qui n’eurent qu’un médiocre succès, ne prouveraient pas en faveur des talents militaires de ce prince, mais il est certain que lorsqu’il résolut de s’établir dans le Valois de manière à se rendre maître du pouvoir et à dominer Paris, il