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renforcée par un éperon C ou bec saillant. Cet éperon et cette plus forte épaisseur donnée à la maçonnerie ont pour résultat d’annuler les effets du bosson ou bélier, et de placer l’assaillant sous le tir direct des flanquements voisins (voyez Architecture Militaire, Porte). De la ville, on entre dans la tour par la porte P, et la rampe droite qui monte au premier étage. De ce premier étage, par l’escalier à vis, on descend à l’étage inférieur et l’on monte aux étages supérieurs.

L’étage crénelé, et pouvant être muni de hourds, est mis en communication avec le chemin de ronde des courtines par les deux portes K et L. Ce chemin de ronde pourtourne l’étage supérieur de la tour du côté de la ville en G. Une coupe faite sur ab (fig. 26) permet de saisir facilement ces dispositions. L’étage H renferme une cheminée et est éclairé par une fenêtre F donnant sur la cité. Les hourds étaient posés en I, conformément à l’usage. Les meurtrières des deux salles inférieures sont chevauchées, ainsi que l’indique le plan[1].

Cet ouvrage, comme le précédent, appartient aux constructions de Philippe le Hardi, et qui datent, par conséquent, des dernières années du XIIIe siècle.

Quelquefois, à cette époque, pour étendre les flanquements des tours, on leur donne en plan la forme d’un arc brisé[2]. C’est sur ce plan que sont bâties quelques-unes des tours du château de Loches.

Les grands engins d’attaque étaient alors perfectionnés : on leur opposait des murs bâtis en pleine pierre de taille, des merlons épais, des hourds formés de gros bois ; on disposait plusieurs étages voûtés afin de mettre les postes à l’abri des projectiles lancés en bombe. Parfois on revenait à la tour carrée comme présentant des flancs plus étendus et des faces que l’on protégeait par des hourdages très-saillants et bientôt par des mâchicoulis de pierre.

Les tours d’Aigues-Mortes, bâties par Philippe le Hardi, sont sur plan quadrangulaire ; même plan adopté pour la plus grande partie des tours de l’enceinte d’Avignon. Il faut dire que tout un front de ces remparts fut ordonné sous le pape Innocent VI, par Jean Fernandez Heredia, commandeur de Malte, et que les dispositions adoptées alors furent suivies successivement, c’est-à-dire de 1350 à 1364[3]. La plupart de ces tours sont très-saillantes sur la courtine, dont le chemin de ronde passe derrière elles ou qui se trouve interrompu par les flancs. De plus, ces tours sont généralement ouvertes à la gorge.

La figure 27 présente le plan d’une de ces tours d’Avignon, à rez-de-

  1. Les meurtrières du rez-de-chaussée sont hachées, ainsi que la porte qui, de cet étage, donne dans l’escalier à vis.
  2. Voyez Architecture Militaire, fig.24 bis.
  3. La plupart des ouvrages militaires des ordres du Temple et de Malte présentent des tours carrées. (Voyez Essai sur la dominat. franç. en Syrie durant le moyen âge, par E. G. Rey, 1866.)