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aussi la place d’honneur dans les cérémonies, telles qu’hommages, investitures ; pendant les banquets, les assemblées, bals, etc. C’est sur cette estrade que s’élève la cheminée, comme dans la grand’salle du palais de Poitiers (voy. Cheminée, fig. 9 et 10).

On pouvait aussi, du donjon, pénétrer dans la grand’salle en passant sur la porte du château, dans la pièce située au-dessus du corps de garde et le vestibule V. La grand’salle du premier étage était en communication directe avec les défenses par les issues X, très-nombreuses. En cas d’attaque, la garnison pouvait être convoquée dans cette salle seigneuriale, recevoir des instructions, et, se répandre instantanément sur les chemins de ronde des mâchicoulis et dans les tours.

La coupe (fig. 8) sur tu, en regardant vers l’entrée, explique plus complètement ces dispositions. Au-dessous de l’étage A est un étage de caves dont le sol est au niveau du chemin de ronde extérieur, B étant le niveau du sol de la cour. On voit, dans cette coupe, comment est construit le portique de plain-pied avec la salle basse et entresolé de façon à donner une vue et, au besoin, une surveillance sur cette salle basse, car le portique inférieur est vitré en a, tandis que le portique d’entresol est vitré en b. Au niveau du plancher de la grand’salle du premier étage, ce portique forme une terrasse ou promenoir extérieur sur la cour. On voit en d le chemin de ronde des mâchicoulis, qui est également de plain-pied avec la grand’salle.

Sur le vestibule V (voyez le plan) de cette grand’salle, est une tribune qui servait à placer des musiciens lors des banquets ou fêtes que donnait le seigneur. De ces dispositions il résulte clairement que les salles basses étaient isolées des défenses, tandis que la grand’salle haute, située au premier étage, était au contraire en communication directe et fréquente avec elles ; que la salle haute, ou grand’salle, était de plain-pied avec les appartements du seigneur, et qu’on séparait au besoin les hommes se tenant habituellement dans la salle basse, des fonctions auxquelles était réservée la plus haute. Ce programme, si bien écrit à Pierrefonds, jette un jour nouveau sur les habitudes des seigneurs féodaux, obligés de recevoir dans leurs châteaux des garnisons d’aventuriers.

On nous objectera peut-être que ces dispositions à Pierrefonds étaient tellement ruinées, que la restauration peut être hypothétique. À cette objection nous répondrons : 1o Que le mur extérieur était complètement conservé, par conséquent les hauteurs des étages ; 2o que le portique était écrit par l’épaisseur du mur intérieur et par les fragments de cette structure trouvés dans les fouilles ; 3o que l’escalier l du plan, conservé, ne montant qu’à une hauteur d’entresol, indiquait clairement le niveau de cet entresol ; 4o que la position de l’escalier à double degré était donnée par le plan conservé ; 5o que les cheminées étaient encore en place, ainsi que les murs de refend ; 6o que les dispositions du corps de garde et de ses issues sont anciennes, ainsi que celles de la salle des latrines ; 7o que le tambour h (voy. les plans) était indiqué par des arrachements ;