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[serrurerie]
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un piton tenant au pêle auquel est rivée librement une poignée mobile. Deux filets-embrasses, avec talons a, renforcent la coque le long de ses rives, et permettent de la fixer au battement de la croisée au moyen des pointes b qui sont rabattues en dehors. Le pêle entre simplement dans une platine à gâche fixée au meneau, car ici la croisée ne possède pas de dormant. Cette autre targette B est dans le même cas : son pêle tombe dans une platine à gâche ; sa coque est maintenue, comme la précédente, à la traverse du châssis par deux embrasses à pointes. La poignée, au lieu d’être mobile, consiste en un animal finement forgé et buriné, qui, étant bien en main, facilite le tirage ou la poussée[1]. En d, la targette est présentée de profil ; en e, de face (l’animal étant supposé enlevé). Le tracé g donne sa section. Le piton de la poignée mobile de la targette A et la poignée fixe de la targette B sont rivés aux pêles avant que les platines formant fond aient été elles-mêmes rivées aux coques : cela est tout simple.

La targette C appartenait à un châssis de croisée muni d’un dormant, puisque la gâche h existe[2], et était encore fixée à ce dormant. La poignée, en façon de jambe, est mobile (voyez la section l). La coque n’a pas la forme d’un trapèze, mais d’un parallélogramme ; elle n’est plus fixée par des embrasses à pointes, mais par des clous passant à travers les débords de la platine de fond, à laquelle sont rivées les embrasses. Comme précédemment, cette platine de fond n’a été fixée que quand le pêle a été ajusté dans le devant de la coque et que le piton portant la goupille de la poignée a été rivé. Ces objets sont délicatement travaillés, en bon fer et solidement faits.

Mais les châssis de croisée, pendant le moyen âge, étaient le plus habituellement munis de volets intérieurs qui se fermaient par parties, de manière à donner plus ou moins de jour dans les appartements (voyez Menuiserie, fig. 20). Ces volets étaient ferrés sur les dormants, mais plus habituellement sur les châssis ouvrants, de manière qu’il ne fût pas nécessaire de développer le vantail préalablement, pour ouvrir la fenêtre. Dans le premier cas, les targettes étaient disposées de telle manière qu’il fallait absolument ouvrir les volets pour ouvrir la fenêtre, afin de ne pas risquer, par inadvertance, de forcer les paumelles ou les pivots du châssis de croisée ; mais aussi ces targettes fermaient-elles, au besoin, le châssis de croisée et les volets, soit un, soit deux, suivant le besoin.

La figure 38 nous montre une de ces targettes[3]. Cette fois, le pêle ne

  1. Trouvée à Cahors, attachée à un vantail d’armoire moderne. Cette targette paraît appartenir au milieu du XIVe siècle.
  2. Dessinée en 1841 dans l’ancien palais des comtes de Nevers, à Nevers, aujourd’hui palais de justice, fin du XVe siècle.
  3. D’une fenêtre de l’ancien évêché d’Auxerre, aujourd’hui préfecture. Cette targette paraissait appartenir au XIVe siècle. Nous l’avons dessinée en 1843 ; elle tenait encore à un vieux châssis déposé dans le beau grenier lambrissé dépendant de l’ancienne grand’salle.