Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 7.djvu/559

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[proportion]
— 556 —

de ce qu’elle n’a plus que des proportions relatives au lieu de posséder des proportions absolues, on n’en pourrait conclure que l’architecture gothique, ainsi que l’a fait M. Quatremère de Quincy, est dénuée de tout principe de proportions. La colonne, dans l’architecture romane et gothique, n’est plus un support destiné à soutenir une plate-bande, c’est un nerf recevant des arcs de voûtes ; sa fonction n’étant plus la même, il est assez naturel que ses proportions diffèrent. Au lieu d’être un objet principal dans l’architecture, elle n’est plus qu’un objet accessoire qui se soumet aux lois générales de la structure et aux proportions sur lesquelles celle-ci s’établit.


Mais en ce point, comme en beaucoup d’autres, lorsqu’il s’agit de comparer les arts de l’antiquité et ceux du moyen âge, on commence par un malentendu : autant vaudrait dire que la langue française n’est pas une langue, parce qu’elle possède une syntaxe différente de la syntaxe grecque, ou qu’un cheval est un animal difforme parce que son organisation diffère essentiellement de l’organisation d’une hirondelle. C’est, à notre sens, rapetisser le champ des études, et réduire singulièrement les ressources de l’art que de prétendre borner l’esprit humain à une seule donnée, si parfaite qu’elle soit ; et si l’on voulait absolument établir une comparaison entre l’art grec et l’art du moyen âge, il faudrait d’abord imposer à un architecte grec le programme qui fut donné à l’architecte de la cathédrale de Beauvais, et voir comment, à l’aide de ces éléments, il pourrait y satisfaire. Or, les programmes donnés de nos jours se rapprochant sensiblement plus de ceux qui étaient imposés aux architectes du moyen âge que de ceux fournis aux architectes grecs, on ne conçoit guère comment, pour les remplir, soit par les moyens matériels, soit