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ble ; cependant on voit, par cet exemple, qu’il a pu établir un rapport entre les deux opérations, celle du collatéral inférieur et celle du triforium. Tout cela dénote évidemment un art très-savant, une étude approfondie des effets, des connaissances supérieures, une expérience consommée.

Ailleurs[1] nous avons expliqué comment les proportions des cathédrales de Paris et d’Amiens avaient été établies à l’aide des triangles égyptien et équilatéral. En effet, le triangle isocèle rectangle est rarement admis comme principe de proportions dans les édifices de la période gothique ; le triangle dont la base contient quatre parties, et la verticale élevée du milieu de cette base au sommet, deux parties et demie (triangle égyptien), et le triangle équilatéral, deviennent dorénavant les générateurs des proportions.

Nous en trouvons un exemple frappant dans un édifice remarquable par l’harmonie parfaite de ses parties, la sainte Chapelle du Palais, à Paris. Ce monument religieux, considéré de tout temps, avec raison, comme un chef-d’œuvre, procède, quant à ses proportions, de triangles équilatéraux.

La sainte Chapelle de Paris se compose de deux étages : la chapelle basse et la chapelle haute[2]. Voici (fig. 4) comment Pierre de Montereau, l’architecte de ce monument, a procédé pour établir ses plans et coupes :

En A, est tracée une travée du plan du rez-de-chaussée ; en B, une travée du plan du premier étage. Au premier étage, la projection horizontale des voûtes est obtenue au moyen du triangle équilatéral abc, le sommet c donnant le centre de la clef de la voûte ; les nervures des arcs ogives sont projetées suivant les lignes bc, ac, la base ab étant le nu intérieur. Le niveau d du banc intérieur (voy. la coupe transversale) est la base de l’opération. Le nu intérieur étant la verticale e (c’est l’axe des colonnettes de l’arcature), le triangle équilatéral efg a été élevé sur la base, dont eh est la moitié. Les côtés de ce triangle équilatéral ont été prolongés indéfiniment. La ligne horizontale ik étant donnée comme le niveau de l’appui des grandes fenêtres, sur la base ik égale à he a été élevé le second triangle équilatéral, dont l est le sommet. Ce sommet a donné la hauteur des naissances de la voûte. Le côté gf prolongé a donné en m les clefs des arcs des fenêtres. Pour la chapelle basse, les axes des colonnes isolées se trouvent élevés aux deux extrémités de la base du triangle équilatéral dont no est un des côtés. Du niveau p (naissance des voûtes basses) et de l’axe des colonnes, la rencontre de la ligne pq avec le prolongement du côté fe a donné la clef des fenêtres de la chapelle basse. Les côtés fm prolongés ont servi à poser les pinacles supérieurs. La pente rs du comble est également tracée suivant un angle de 60º. Ainsi, pour la

  1. Voyez le neuvième entretien sur l’architecture, fig. 9 et 10.
  2. Voyez Chapelle, fig. 1, 2 et 3.