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sidérable ; mais les principales écoles de la France, dès le commencement du XIIe siècle, avaient adopté, pour les portes des églises comme pour les autres parties de l’architecture, des types assez différents les uns des autres, bien que soumis au principe commun d’arcs et de linteaux indiqués plus haut. L’Auvergne, le Nivernais et une partie du Berry ; l’Île-de-France, la Champagne, la Picardie, la Normandie, le Poitou et la Saintonge, le Languedoc, la Bourgogne, présentaient alors huit types distincts qui se confondirent au XIIIe siècle dans l’unité gothique. Nous ne prétendons pas établir que ces provinces élevassent chacune de leur côté des portes d’églises suivant un modèle admis, invariable ; nous constatons seulement que l’on trouve, dans chacune de ces écoles, des similitudes, soit dans les proportions, soit dans les décorations, soit dans la construction ; qu’il est impossible, par exemple, de confondre une porte romane de la Champagne avec une porte de la même époque appartenant à un monument religieux de l’Auvergne ou du Poitou. C’est en Auvergne et dans le Nivernais, dans cette école romane si avancée dès le commencement du XIIe siècle, que nous trouvons les exemples de portes les plus remarquables par la façon dont elles sont composées et appareillées.

La porte principale de l’église Saint-Étienne de Nevers est un des exemples les plus francs de l’école des provinces du centre, et des plus anciens. Cette porte date des dernières années du XIe siècle. Elle était entièrement peinte. Les chapiteaux de ses colonnes n’étaient ornés que par de la peinture. Les claveaux, appareillés d’une façon remarquable, étaient également couverts de peintures représentant des oiseaux affrontés et des ornements sur fond noir. Nous donnons (fig. 52) le plan et l’élévation de cette porte. Le linteau et le tympan ont disparu ; ils étaient très-probablement décorés seulement par des peintures. On doit signaler, comme appartenant à cette école, la proportion relativement élancée de la baie ; la grosseur inusitée des deux premières colonnes qui rappellent les exemples gallo-romains, et enfin cet appareil de claveaux qui est motivé par la nécessité d’employer de très-petits matériaux.

Cependant les colonnes sont monolithes et ont été taillées au tour, conformément à un usage admis dans les provinces du Centre, pendant les XIe et XIIe siècles ; les chapiteaux sont également tournés, sauf les tailloirs, qui sont rectangulaires et sont pris dans une autre assise de pierre. En A, est tracé le profil des archivoltes. Cet art roman de l’Auvergne et du Nivernais, déjà délicat vers la fin du XIe siècle, bien étudié quant aux proportions et aux profils, devait promptement produire des résultats remarquables ; et en effet, dès le milieu du XIIe siècle, dans la même ville, à Nevers, on élevait la porte de l’église de Saint-Genest, qui peut être considérée comme un chef-d’œuvre par ses bonnes proportions, la beauté et la sobriété de sa sculpture. Cette porte (fig. 53), qui n’a que 2 mètres d’ouverture, ne possède, pas plus que la précédente, de tru-