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saillants ou les trous qui servaient à poser la tringle de bois à laquelle étaient suspendues ces sortes de portières d’étoffes.

Sous le clocher de l’église de Saint-Savin, près de Poitiers, il existe un porche de la même époque, entièrement revêtu à l’intérieur de peintures remarquables. Ce porche, plus simple comme architecture que celui de Créteil, présente d’ailleurs une disposition analogue[1]. Le clocher occidental de l’église collégiale de Poissy s’élève sur un porche d’une date ancienne (commencement du XIe siècle) ; il s’ouvre de même sur la voie publique par une seule arcade et est voûté en berceau plein cintre[2].

Si l’on pénètre dans les provinces du centre, à Tulle, à la Châtre, on voit des porches sous clochers avec trois arcades ouvertes, l’une en face de l’entrée, deux latéralement. Ces porches datent de la fin du XIIe siècle et participent des dispositions admises pour les porches sous clochers du Limousin et du Périgord.

Parmi les porches les plus remarquables élevés sous l’influence de ces deux écoles, mais qui ne possèdent pas cependant les piles intérieures que nous voyons dans les porches de Limoges, de Lesterps et de Saint-Benoît-sur-Loire, il faut citer celui de l’église abbatiale de Moissac (Tarn-et-Garonne).

La structure de ce porche est d’un grand intérêt pour l’histoire de l’art. Elle date de deux époques assez rapprochées l’une de l’autre, du commencement et du milieu du XIIe siècle.

La figure 24 en retrace le plan à rez-de-chaussée. Primitivement, ce porche s’ouvrait du côté du midi, en C, par une large arcade en tiers-point. Du côté de l’ouest, en D, et du côté du nord, en E, il s’ouvrait sur des dépendances de l’abbaye, sur les cloîtres, et était fermé par des vantaux.

Une troisième porte F, avec trumeau central, donnait accès dans la nef de l’église. Peu après sa construction, c’est-à-dire vers 1150, on ajouta, au grand porche portant un gros clocher, un second porche ou abri extérieur G, richement décoré de bas-reliefs et de sculptures d’un très-grand style (voy. Statuaire). On éleva les piliers H et les contreforts I. Ces constructions accolées servirent à porter un chemin de ronde crénelé qui défendait l’entrée de l’église. La figure 25 donne le plan de la salle bâtie au-dessus du porche, et sur les piles de laquelle devait s’élever un clocher qui ne fut pas terminé. La différence des teintes du plan indique la construction première et les adjonctions faites au milieu du XIIe siècle pour recevoir les crénelages à deux étages sur le porche extérieur en K, et à un seul chemin de ronde sur les côtés L et M. C’était une tentative assez hardie, au commencement du XIIe siècle, que de couvrir une salle de 10 mètres de côté par une seule voûte qui ne

  1. Voyez Monographie de l’église de Saint-Savin, publiée par les soins du ministre de l’instruction publique.
  2. Il faut citer aussi un de ces porches conservé sous le clocher occidental de l’église Saint-Séverin de Bordeaux, et qui date du commencement du XIIe siècle.