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[palais]
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était une chapelle placée sous le vocable de saint Michel, en R le pont aux Changeurs, et en S le pont aux Meuniers, ou le Grand-Pont. En T le jardin, les treilles du roi, séparé d’une petite île (île aux Vaches) par un bras de la Seine. Là était le bâtiment des étuves. De ce vaste ensemble de logis et monuments, il reste encore aujourd’hui : la sainte Chapelle, privée seulement de son annexe V à trois étages, servant de sacristie et de trésor des chartes ; le rez-de-chaussée de la grand’salle, tel que le donne notre plan ; une partie notable des portiques K ; la partie intérieure du bâtiment des cuisines et de la salle B, ainsi que les quatre tours sur le quai de l’Horloge ; le logis L dans toute sa hauteur. C’était dans la cour X qu’était planté le May. Cette réunion de monuments, tous d’une bonne architecture, présentait au centre de la Cité l’aspect le plus saisissant. Nous avons essayé d’en donner une idée dans la vue cavalière (fig. 3) prise de la pointe de l’île en aval[1]. Les étrangers qui visitaient la capitale s’émerveillaient fort de la beauté des bâtiments du Palais, principalement de l’effet de la cour du May, qui, en entrant par la porte donnant sur la rue de la Barillerie, présentait une réunion d’édifices plantés de la manière la plus pittoresque. Le grand perron, qui donnait au premier étage de la galerie d’Enguerrand ; celui de droite, qui montait sur la terrasse, communiquant à la grand’salle ; les parois de celle-ci avec ses fenêtres à meneaux ; le gros donjon de Montgomery, dont la toiture paraissait au-dessus des combles de la grande galerie ; la sainte Chapelle, avec son trésor, formaient réellement un bel ensemble, quoique peu symétrique. Si l’on tournait à gauche vers la chapelle Saint-Michel, on découvrait la façade élégante de la chambre des comptes avec son gracieux escalier couvert, puis l’escalier de la sainte Chapelle bâti par Louis XII, puis le gros donjon relégué au fond de la cour. En longeant la chambre des comptes, on passait dans les jardins du Palais, et l’on voyait se développer la façade mouvementée du logis, dont il reste encore aujourd’hui toute une portion. À chaque pas, c’était un aspect nouveau, une surprise, et la variété de toutes ces constructions contribuait à augmenter leur étendue. Il y a bien loin de ce palais aux bâtisses glaciales et ennuyeuses par leur monotonie, auxquelles nous sommes habitués depuis le grand siècle.

C’est dans ce palais que Charles V reçut et logea l’empereur Charles IV, probablement dans des bâtiments qui occupaient l’emplacement affecté plus tard à la chambre des comptes… « Lors, fist le roy lever l’empereur, à tout sa chayere, et, contremont les degrez porter en sa chambre (l’empereur était goutteux), et aloit le roy, d’un costé, et menoit le roy

  1. Voyez le grand Plan de Paris à vol d’oiseau, par Mérian, et la Tapisserie de l’hôtel de ville ; la Topographie de la Gaule, par Mérian ; Livre troisième de la Cosmogr. universelle, Sébastien Munster et Belle-Forest, 1665 ; le Plan de Gomboust ; l’œuvre d’Israël Sylvestre ; la Topographie de la France bibliog. imp. ; l’œuvre de Pérelle (vue du pont au Change) ; l’Hist. pittor. du Palais de justice, par Sauvan et Schmit, 1825 ; l’Itinéraire arch. de Paris, par M. le baron de Guilhermy.