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lumière et empêcher le vent ou la pluie de pénétrer dans les intérieurs. Lorsque l’usage des vitrages devint habituel, vers le XIe siècle, on garnit les baies de vitraux maintenus au moyen de barlotières en fer. Mais vers la fin du XIIe siècle, au moment de l’adoption du système de l’architecture dite gothique, les fenêtres venant à s’agrandir, il fallut disposer dans leur surface vide des séparations en pierre pour maintenir les vitraux ; car les armatures en fer, difficiles à fabriquer, flexibles, ne présentaient pas une résistance suffisante à l’effort du vent. D’ailleurs, ces baies larges et hautes, laissées vides, n’étaient pas d’un heureux effet ; elles ne donnaient pas l’échelle de la structure, et les architectes des écoles laïques de la fin du XIIe siècle possédaient assez le sentiment des proportions pour ne pas laisser de grandes surfaces vides sans les occuper par des compartiments de pierre qui pouvaient seuls rappeler leur dimension. On voit apparaître ces divisions vers les premières années du XIIIe siècle dans l’Île-de-France, le Soissonnais, le Beauvaisis et la Champagne. Ces premiers meneaux sont composés d’assises de pierre, sont bâtis. Tels sont les meneaux de la cathédrale de Soissons et de la cathédrale de Chartres. Les meneaux des fenêtres des chapelles du chœur de Notre-Dame de Reims, bien qu’ils datent de 1215 environ, sont encore composés d’assises ou de claveaux (voy. fenêtre, fig. 13, 14, 15, 16, 17 et 18). Mais bientôt l’école laïque du XIIIe siècle fit, des meneaux, de véritables châssis de pierre formés de montants posés en délit et de compartiments ajourés découpés dans des dalles plus ou moins épaisses suivant les dimensions des baies. Dans les édifices voûtés, comme les églises ou certaines grandes salles d’assemblée, dont les fenêtres occupent toute ou presque toute la surface laissée sous les formerets des voûtes, les meneaux se composent d’abord d’un montant central, avec deux tiers-points surmontés d’un œil. Telles sont les fenêtres hautes du chœur et de la nef de la cathédrale de Paris, refaites vers 1225 (voir cathédrale, fig. 3 et 4). Or, les meneaux des fenêtres hautes de Notre-Dame de Paris peuvent être considérés comme les premiers qui aient été faits en manière de châssis de pierre, rigides, entre des pieds-droits et des arcs construits par assises.

Il est intéressant de voir comment l’architecte introduisit ces châssis de pierre dans les anciennes fenêtres du XIIe siècle, et comment les meneaux furent appareillés. Les fenêtres hautes du chœur de Notre-Dame de Paris avaient été construites vers 1170. Elles se composaient (1), conformément au tracé A, de pieds-droits avec colonnettes à l’extérieur (voir la section horizontale B, faite sur ab), surmontés de deux arcs en tiers-point concentriques C extradossés d’un rang de damiers. En D était le filet de recouvrement du comble en appentis posé sur la galerie, et en E des roses s’ouvrant sous cet appentis au-dessus des voûtes de cette galerie (voir cathédrale, fig. 3 et 4). Le système, nouveau alors, des meneaux qui permettaient de remplir de très-grandes fenêtres de vitraux colorés, avait si bien séduit les évêques, les chapitres et leurs architectes, qu’on