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issues directes. De la galerie D on se rendait à la chapelle E, à laquelle aussi on montait directement du vestibule inférieur par l’escalier F. Une autre galerie G mettait également la chapelle en communication avec la salle J et l’appartement séparé K, lequel possédait un escalier L particulier. Le service de l’appartement principal C se faisait par l’escalier M ou par l’escalier X. Le salon I trouvait une issue par l’escalier N ; la grande salle B elle-même, outre le grand escalier, était desservie par le second escalier O. Au premier étage comme au rez-de-chaussée, les divers services de cet hôtel étaient rendus indépendants, et les pièces destinées aux réceptions ne pouvaient gêner les dispositions privées des habitants. Comme dans les châteaux, on voit que le programme obligeait l’architecte à trouver des combinaisons de plans très-compliquées pour satisfaire aux goûts ou aux besoins particuliers du propriétaire. Il est certain que ces dégagements nombreux, dissimulés, paraissaient indispensables, et que l’on sacrifiait toute idée de symétrie aux nécessités de l’habitation, telles qu’on les comprenait alors. On observera que les appartements destinés à l’habitation se composent, outre les grandes pièces, de nombreux réduits, cabinets, garde-robes, qui ne laissaient pas d’être fort commodes ; que toutes ces pièces, grandes et petites, sont éclairées.

Jacques Cœur, en utilisant les tours gallo-romaines des remparts, n’avait peut-être pas été fâché de donner à son hôtel un aspect de domaine féodal, et c’est, en grande partie, la conservation de ces tours qui a nécessité les irrégularités de ce plan. L’architecture adoptée se prête d’ailleurs à ces défauts de symétrie, et rien n’est plus pittoresque, plus brillant, que cet intérieur de cour, avec ses tourelles d’escaliers, ses combles distincts surmontés de tuyaux de cheminée, d’épis, de lucarnes, de faîtages de plomb, autrefois dorés et peints.

Nous présentons (35) une vue cavalière de cet hôtel, prise du point P’(voir le plan du rez-de-chaussée). La construction est partout traitée avec un soin extrême et la sculpture d’un charmant style, appropriée à chacun des services, entremêlée d’emblèmes, de devises, de cœurs, de plumes et de coquilles. Ainsi, au-dessus des trois baies de l’escalier de la chapelle, dans les tympans, le sculpteur a placé un prêtre revêtu de l’aube, se disposant à la bénédiction de l’eau ; derrière lui un jeune clerc sonne la messe ; puis vient un mendiant, appuyé sur une béquille, comme pour indiquer que le lieu saint est accessible à tous. Le second bas-relief représente des clercs préparant l’autel. Le troisième, des femmes qui arrivent à l’office, précédées d’un enfant qui ouvre une porte. En haut de l’escalier est un quatrième bas-relief représentant le Père Éternel avec deux anges en adoration. Au-dessus de la porte de l’escalier, côté des cuisines, est sculptée une large cheminée devant laquelle pend un coquemard ; un enfant tourne la broche, une femme lave des plats, et un cuisinier pile des épices dans un mortier.

Parmi les devises gravées sur quelques tympans, ou peintes sur des