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les autres (voir la coupe A), de sorte que le troisième étage prend une surface sensiblement plus grande que celle occupée par le rez-de-chaussée. La corniche à la base du pignon figure une suite de mâchicoulis.

Au XVe siècle, les fenêtres de ces maisons de bois sont multipliées et petites ; cela était une nécessité de construction dès lors que les pans de bois atteignaient une grande hauteur. En effet, ces sortes de constructions, par la nature même de la matière employée, sont sujettes à jouer. De grands châssis de fenêtres eussent été souvent dérangés, comprimés ou gauchis par le mouvement des pièces de bois. Il eût fallu continuellement les démonter et les retoucher, tandis que de petits châssis étaient bien moins sensibles aux changements de température ou suivaient plus aisément les mouvements de la charpente. On remarquera, d’ailleurs, que les allèges de ces fenêtres, soigneusement garnies de croix de Saint-André, empêchaient le déversement des poteaux d’huisseries, et que le poids des pans de bois est reporté sur les poteaux corniers par des décharges à chaque étage. Mais les habitants des villes du Nord cherchent de plus en plus à ouvrir ces façades en bois. À la fin du XVe siècle souvent, ils en font de véritables lanternes, ainsi que le démontre l’exemple ci-contre (28) tiré également d’une maison de Rouen[1]. Seules les alléges avec leurs croix de Saint-André arrêtent le roulement du pan de bois, taillé du reste avec toute la perfection d’une œuvre de menuiserie. C’est que aussi, à cette époque, la maison de bois perd le caractère de construction de charpenterie pour prendre celui d’un meuble, d’un bahut immense.

Dans la figure 28, les hourdis en maçonnerie dans les allèges sont encore apparents ; bientôt ces hourdis disparaissent derrière des panneaux de menuiserie, et toute la face de la maison ne présente plus qu’un assemblage de boiseries. C’est d’après cette donnée qu’ont été construites beaucoup de maisons à la fin du XVe siècle et au commencement du XVIe.

La figure 29, qui reproduit une portion d’habitation de l’abbaye de Saint-Amand, à Rouen, laisse voir au-dessus d’un rez-de-chaussée en maçonnerie deux étages de pans de bois entièrement garnis, à l’extérieur, de panneaux de menuiserie sculptés. Lorsqu’un peu plus tard, avec la Renaissance, on en revint aux constructions de pierre, cette habitude s’était si bien conservée que l’on bâtit encore un grand nombre de maisons de bois, mais dans lesquelles cependant on trouve des formes de pilastres et de bandeaux qui n’appartiennent point au système de construction en charpente. Il existe encore dans la rue de la Grosse-

    et d’Orléans relevées avec un soin extrême. Le ministre d’État, sur la demande de la commission des monuments historiques, a fait relever aussi un certain nombre de ces maisons d’Orléans par M. Vaudoyer.

  1. Rue Malpalu. Nous empruntons encore ce dessin au travail de M. Devret.