Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 6.djvu/226

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[maison]
— 223 —

cuisine par une galerie. C’est d’après ce système que sont élevées les maisons de la ville de Cluny qui datent du XIIe siècle[1]. Nous donnons (4) le plan de l’une d’elles.

Le rez-de-chaussée A fait voir l’allée avec le degré droit en C, la boutique en D, la galerie ou portique à jour en E, la cour en F, la cuisine en H avec sa grande cheminée I. Un puits est en G. Le premier étage, tracé en B, montre l’arrivée du degré en K, la salle en L, la galerie à jour ou vitrée en N avec un petit degré pour monter aux galetas, et une chambre en O. La coupe générale sur ab de cette maison est tracée dans la figure 5 en A, et l’élévation de la façade sur la rue en B. Cette façade est encore aujourd’hui conservée jusqu’au niveau C, l’étage du galetas ayant seul été détruit ; quant aux bâtiments postérieurs, il en reste à peine quelques traces. Les maisons du XIIe siècle de la ville de Cluny sont mitoyennes, c’est-à-dire séparées par des murs communs à deux propriétés, et bien que cette coutume soit ordinaire dans la plupart des villes françaises, il est certaines localités, particulièrement en Bourgogne, où les maisons des XIIe et XIIIe siècles sont séparées par une ruelle étroite et possèdent par conséquent chacune des murs latéraux indépendants. On peut reconnaître que cette coutume existait également dans la plupart des bastides, ou petites villes fermées, élevées d’un seul jet à la fin du XIIIe siècle, sous la domination d’Édouard Ier, dans la Guienne. Mais les règlements en vigueur concernant la plantation des maisons dans les villes de France au moyen âge, leurs saillies sur la voie publique, la manière de prendre les jours, les écoulements des eaux, variaient à l’infini, chaque seigneur ayant établi une coutume particulière sur le territoire soumis à sa juridiction. Il arrivait aussi que deux maisons étaient accolées avec mur mitoyen intermédiaire, comble unique à deux égoûts sur deux ruelles latérales.

On voit encore dans la petite ville de Montréal (Yonne) quelques maisons construites d’après ce système, et une, entre autres, proche de la porte du côté d’Avallon, qui est assez bien conservée. La fig. 6 en reproduit le plan. Cette maison double paraît remonter aux premières années du XIIIe siècle.

En A sont les entrées avec perrons et bancs de pierre ; en B, les descentes de caves donnant, suivant l’habitude bourguignonne, sur la voie publique ; en CC′, les salles du rez-de-chaussée. En D sont deux petites cours entourées d’appentis en bois ne s’élevant que d’un rez-de-chaussée. La cage de l’escalier est commune, bien que ses rampes soient séparées. De la salle C, on monte au premier en prenant le palier E, et de la salle C′ en prenant le palier F ; ainsi, à l’étage supérieur, la porte de l’escalier de la maison C est en G, et celle de la maison C′ est en H. En I est un puits commun. Sur la rue, cette maison double présente la façade (7).

  1. Voy. l’Architecture domestique de MM. Verdier et Cattois. M. Verdier a relevé quelques-unes de ces jolies maisons.