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[construction]
[voûtes]
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l’intérieur, posées sur des claires-voies de pierre portées par des arcs ogives. Ce système de construction est élégant et ingénieux ; mais on voudrait voir ici des fenêtres carrées, car les formerets en tiers-point qui les ferment n’ont plus de raison d’être. Le système des voûtes gothiques devait en venir là, c’était nécessairement sa dernière expression. Fermer les intervalles laissés entre les arcs par des plafonds, et, au besoin, multiplier les arcs à ce point de n’avoir plus entre eux que des surfaces pouvant être facilement remplies par une ou deux dalles, c’était arriver à la limite du système, et c’est ce qui fut tenté, souvent avec succès, au commencement de la renaissance, soit dans les monuments religieux, soit dans l’architecture civile. Il convient même de rendre cette justice aux architectes de la renaissance française qu’ils surent employer avec une grande liberté les méthodes gothiques touchant la construction des voûtes, et qu’en s’affranchissant de la routine dans laquelle se tenaient les maîtres du XVe siècle, ils appliquèrent aux formes nouvelles les ressources de l’art de la construction du moyen âge.

Au commencement du XVIe siècle, les architectes employèrent très-fréquemment le système de voûtes composées de dalles portées sur des nerfs, ce qui leur permit de décorer ces voûtes de riches sculptures et d’obtenir des effets inconnus jusqu’alors. Composant des sortes de réseaux de pierre, avec clefs pendantes ou rosaces aux points de rencontre des nervures, ils posèrent des dalles sculptées entre elles. Ce parti fut souvent adopté, par exemple, pour voûter des galeries ou des rampes d’escaliers en berceau surbaissé (74). Chaque claveau d’arête transversale A porte, des deux côtés de la petite clef pendante, une coupe B pour recevoir les claveaux C longitudinaux ; les dalles D viennent simplement reposer en feuillures sur ces claveaux, ainsi que l’indique le détail X ; A′ est la coupe de l’un des arcs transversaux, B′ un des claveaux de plates-bandes longitudinales, D′ la coupe de la dalle. Cette méthode est simple, et une pareille construction est bonne, facile à exécuter, les dalles pouvant être sculptées avant la pose ; elle présente toute l’élasticité que les constructeurs gothiques avaient obtenue dans la combinaison de leurs voûtes. Mais les artistes de la renaissance oublièrent assez promptement ces traditions excellentes, et s’ils conservèrent encore longtemps ces formes dérivées d’un principe raisonné de construction, ils appareillèrent ces sortes de voûtes comme des berceaux ordinaires, ne considérant plus les arêtes comme des nerfs indépendants.

Pendant les XVe et XVIe siècles, les Anglais et les Normands étaient arrivés, dans la construction des voûtes, à produire des effets surprenants par leur combinaison et leur richesse. Les architectes de l’Île-de-France, de la Champagne, de la Bourgogne et de la Loire, conservèrent, même dans ces derniers temps de la période gothique, plus de sobriété ; pendant le XVIe siècle, ils cherchèrent bientôt à reproduire les formes, sinon la structure de la voûte romaine.

Lorsque le caractère des populations est laissé à ses inspirations et n’est