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[charpente]
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les solives du plancher. L’armature consiste en une pièce de bois courbe assemblée dans la poutre B et reliée à la flèche par deux boulons de fer serrés au moyen de clavettes[1]. Nous avons vu aussi, dans des constructions civiles, et entre autres dans l’ancien hôtel de la Trémoille à Paris, élevé pendant les dernières années du XVe siècle, des poutres de planchers d’environ 12m,00 de portée armées, ainsi que l’indique la fig. 40 ;


les deux pièces B B, posées bout à bout, étaient noyées en partie dans l’épaisseur de la poutre A recevant les solives, ainsi que l’indique la coupe en C. Les pièces A et B étaient reliées entre elles par des boulons avec clavettes.

Un des caractères particuliers à l’art de la charpenterie du moyen âge, c’est sa franchise d’allure, sa connaissance des bois et son respect, dirons-nous, pour leurs propriétés. Les assemblages des charpentes du moyen âge méritent d’être scrupuleusement étudiés ; ils sont simples, bien proportionnés à la force des bois ou à l’objet particulier auquel ils doivent satisfaire. La prévision qui fait réserver, dans une longue pièce de bois, certains renforts, certains épaulements qui ajouteront à la force d’un assemblage, le choix des bois ou leur position suivant la place qu’ils doivent occuper, l’attention à ne pas les engager dans les maçonneries mais à les laisser libres, aérés, indiquent de la part des maîtres la connaissance parfaite de leur art, des qualités des matériaux, l’étude et le soin ; de même que la pureté et la juste proportion des assemblages indiquent chez les ouvriers une longue habitude de bien faire. Le charpentier du moyen âge n’appelle pas à son aide le serrurier pour relier, brider ou serrer les pièces de bois qu’il met en œuvre, si ce n’est dans quelques cas particuliers et fort rares ; il se suffit à lui-même, et le fer ne vient pas, comme dans les charpentes modernes, suppléer à l’insuffisance ou à la faiblesse des assemblages.

L’art de la charpenterie est un de ceux auxquels les perfectionnements modernes ont peu ajouté ; il était arrivé, pendant le XVe siècle, à son complet développement. Le bois, à cette époque, entrait pour beaucoup

  1. Ce renseignement curieux nous a été fourni par M. Alfred Ramé.