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inférieure avec sa piscine, font toute leur décoration à l’intérieur ; les fenêtres, comme à la Sainte-Chapelle de Paris, occupent tout l’espace compris entre cette arcature, les piles et les voûtes, auxquelles leurs archivoltes servent de formerets. À l’extérieur, une belle corniche à crochets et feuilles les couronne ; les contreforts, dont toute la saillie est reportée en dehors, reçoivent des archivoltes abritant les fenêtres et dont l’épaisseur porte le chéneau supérieur. Les bahuts de la charpente reposent directement sur les formerets des voûtes. Il est impossible d’imaginer une construction voûtée plus simple et plus sage. Les sommets des contreforts sont brusquement terminés par des talus sur lesquels viennent se reposer des animaux, chevaux, griffons et dragons. À la chapelle de la Vierge, ces animaux sont remplacés par des rois de Juda (voy. Amortissement). Nous ne pensons pas que ce couronnement soit complet, car on aperçoit, au sommet des contreforts, comme des assises recoupées, des repentirs, des négligences qui marquent une certaine hâte de finir tant bien que mal, et qui ne répondent pas à l’exécution soignée, précise des constructions jusques et y compris la corniche. Ce qui nous confirme dans l’opinion que les couronnements des contreforts des chapelles de la cathédrale d’Amiens[1] n’ont pas été terminés comme ils avaient été projetés, ou que l’incendie qui détruisit leur couverture, avant l’érection de la partie haute du chœur, les ayant calcinés, ils furent refaits avec parcimonie et à la hâte, c’est qu’à Beauvais et à la cathédrale de Cologne particulièrement, les chapelles copiées sur celles d’Amiens portent des pinacles très-élevés et dont la proportion élancée forme un complément indispensable au bon effet de ces contreforts saillants et minces, et plus encore, assurent leur parfaite stabilité par leur poids. Il est intéressant de comparer ces deux édifices, Amiens et Cologne, qui ont entre eux des rapports si intimes. Les chapelles absidales de Cologne, comme celles d’Amiens, reposent sur un plateau circulaire qui les inscrit et sert de base à tout le chevet ; leur proportion est pareille, les meneaux des fenêtres identiques. À Amiens, deux gargouilles prises dans la hauteur du larmier rejettent les eaux des chéneaux à chaque contrefort ; à Cologne, c’est une seule gargouille prise dans la hauteur de la corniche feuillue sous le larmier qui remplit cet office. À Amiens, les balustrades refaites au XVIe siècle devaient, nous le croyons, rappeler la balustrade de la Sainte-Chapelle de Paris ; à Cologne, la balustrade est semblable à celle de Beauvais, Restent les sommets des contreforts, incomplets ou inachevés à Amiens, terminés à Cologne, quelques années après la construction des chapelles, vers le commencement du XIVe siècle, par de hauts pinacles à jour renfermant des statues. Dans l’une comme dans l’autre de ces deux cathédrales, les chapelles absidales sont couvertes par des pavillons en charpente isolés et pyramidaux. À Beauvais,

  1. Voy. au mot Cathédrale l’historique de la construction de la cathédrale d’Amiens. À peine les chapelles de l’abside sont-elles terminées, que les travaux restent suspendus et ne sont repris qu’après un incendie des couvertures inférieures.