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muni à l’extérieur d’une pente fortement inclinée, d’un larmier et d’une feuillure intérieure qui arrête les eaux pénétrant à travers les interstices des vitraux et les force de s’épancher en dehors (1). Quelquefois l’appui porte un petit caniveau à l’intérieur, avec un ou deux orifices destinés à rejeter en dehors les eaux de pluie ou la buée qui se forme contre les vitres. Cette disposition, qui fait ressortir le soin que l’on apportait alors dans les moindres détails de la construction, se trouve particulièrement appliquée aux appuis des fenêtres des habitations.

On remarque dans la plupart des fenêtres des tours de la Cité de Carcassonne, qui datent de la fin du XIIIe siècle, des appuis ainsi taillés (2). Dans les édifices de l’époque romane du XIe au XIIe siècle ces précautions ne sont pas employées ; les appuis des fenêtres ne sont alors qu’une simple tablette horizontale (3), comme dans les bas côtés de la nef de l’église de Vézelay par exemple, ou taillée en biseau des deux côtés, extérieurement pour faciliter l’écoulement des eaux, intérieurement pour laisser pénétrer la lumière (4) (voy. Fenêtre). Dans les églises élevées pendant la première moitié du XIIIe siècle, les appuis forment souvent comme une sorte de cloison mince sous les meneaux des fenêtres supérieures, dans la hauteur du comble placé derrière le triforium sur les bas côtés ; telles sont disposées la plupart des fenêtres hautes des édifices bourguignons bâtis de 1200 à 1250, et notamment celles de l’église de Semur en Auxois (5), dont nous donnons ici un dessin. Ces appuis, contre lesquels est adossé le comble des bas côtés doubles du chœur, n’ont pas plus de 0m,15 d’épaisseur. Ces sortes d’appuis sont fréquents aussi en Normandie, et la nef de l’église d’Eu nous en donne un bel exemple.

Dans l’architecture civile des XIIe et XIIIe siècles les appuis des fenêtres forment presque toujours un bandeau continu, ainsi qu’on peut le voir dans un grand nombre de maisons de Cordes, de Saint-Antonin (Tarn-et-Garonne), sur les façades de la maison romane de Saint-Gilles (6), de la maison des Musiciens à Reims, des charmantes maisons de la ville de Cluny.