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existent ; il ajoute que plus elles sont rapprochées l’une de l’autre, plus elles ajoutent à la force d’une place, non pas tant parce qu’elles frappent l’ennemi en flanc, que parce qu’elles l’atteignent de front… »

Presque toujours ces boulevards ou bastions (car nous pouvons dorénavant leur donner ce nom[1]) n’étaient que des ouvrages en terre avec un revêtement de bois ou de maçonnerie, ne dépassant guère la crête de la contrescarpe du fossé. Lorsque pendant la première moitié du XVIe siècle on remplaça les anciennes courtines et tours en maçonnerie par des défenses nouvelles, tout en leur conservant un commandement élevé sur la campagne, et donnant aux tours un grand diamètre, à leurs maçonneries une très-forte épaisseur (ainsi que nous l’avons fait voir dans les fig. 49, 50 et 51) et aux bastions une forte saillie sur les courtines, on se préoccupa : 1o de protéger leur partie antérieure contre les feux convergents des batteries ennemies ; à cet effet, on établit autour des bastions circulaires et à leur base des fausses braies masquées par la contrescarpe du fossé, et pour rendre celles-ci plus fortes on les flanqua quelquefois. C’était là déjà un grand progrès, car les bastions circulaires, comme les tours rondes, étaient faibles si on les prenait de face, ils n’opposaient aux feux convergents d’une batterie de brèche qu’une ou deux pièces de canon. Voici un exemple de ces fausses braies flanquées (68)[2]. Lorsque l’assiégeant avait détruit la batterie établie en A, qu’il avait terminé ses travaux d’approches, et qu’il débouchait à la

  1. Voy. Bastille, Bastion, Boulevard.
  2. Della Cosmog. universale, Sebast. Munstero, 1558, pet. in-folio. La città d’Augusta, p. 676. Le bastion que nous donnons ici dépend d’un ouvrage avancé fort important qui protégeait un ancien front de vieilles murailles bâties en arrière d’un large fossé plein d’eau. La courtine G est faiblement flanquée par le bastion, parce qu’elle est dominée et enfilée dans toute sa longueur par les vieilles murailles de la ville ; quant à la courtine H, elle se trouvait flanquée par la fausse braie et par le prolongement E du bastion. Si le bastion pouvait être difficilement attaqué derrière les flancs de la fausse braie en D, il était impossible de l’attaquer du côté de la courtine G, car alors l’assiégeant se trouvait pris en revers par l’artillerie postée sur les vieux remparts qui commandaient le flanc I du bastion. On commençait dès lors à appliquer avec assez de méthode le principe : Les dedans doivent commander les dehors, et l’assaillant devenu maître du bastion se trouvait exposé aux feux d’un front très-étendu (voy. 68 bis). A est le front des vieilles murailles remparées, B un large cours d’eau, C un chemin couvert avec barrière, terrassé contre l’ouvrage avancé ; D un petit cours d’eau, E des traverses, F des ponts, G un rempart traversant le fossé, mais dominé, enfilé et battu en revers par les vieilles murailles A de la ville ; H l’ouvrage avancé, I un front de vieilles murailles dérasées et remparées, K un front remparé : ces deux remparts bas sont battus de tous côtés par les murailles de la ville ; L des ponts, M le fossé plein d’eau, N les bastions en terre, charpente et clayonnages, dont l’un est détaillé dans la figure (68) ; O les restes de vieilles défenses terrassées, P les chemins couverts de l’ouvrage avancé. (Voir le plan de la ville d’Augsbourg, qui présente une suite de bastions construits suivant la forme adoptée pour les fausses-braies des bastions d’Augusta. — Introd. à la Fortification, dédiée à monseigneur le duc de Bourgogne. Paris, 1722 ; in-fo ital.)