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En A est l’église, dans le prolongement du transsept, suivant l’usage, la salle du chapitre, la sacristie, etc. ; au-dessus le dortoir. En B le cloître ; en C le réfectoire ; en D le pensionnat ; en E le parloir, et le logement des tourières ; en F les cuisines ; G, les latrines disposées des deux côtés d’un cours d’eau ; H, est le logis de l’abbesse ; I des fours et écuries ; K l’apothicairerie ; L, l’habitation réservée pour le roi saint Louis, lorsqu’il se rendait à Maubuisson avec sa mère. Car, à partir du XIIIe siècle, on trouve dans les abbayes fondées par les personnes royales, un logis réservé pour elles. M, est l’infirmerie ; N, une grange ; O, un colombier ; P, une porcherie ; Q, des écuries, étables ; de I aux écuries, étaient construits des bâtiments qui contenaient le logement des hôtes, mais ces constructions sont d’une époque plus récente ; en R était l’abreuvoir. De vastes jardins et des cours d’eau entouraient ces bâtiments situés dans un charmant vallon, en face la ville de Pontoise, et le tout était ceint de murailles flanquées de tourelles[1].

Le nouvel ordre politique qui naissait avec le XIIIe siècle devait nécessairement modifier profondément l’institut monastique ; il faut dire que les établissements religieux, du moment qu’ils cessaient de combattre soit les abus de pouvoir des seigneurs séculiers, soit les obstacles que leur opposaient des terres incultes, ou l’ignorance et l’abrutissement des populations rurales, tombaient rapidement dans le relâchement. Leurs richesses, leur importance, comme pouvoir religieux, et comme possesseurs territoriaux et féodaux par conséquent, ne pouvant manquer d’introduire au milieu des monastères des habitudes de luxe qui n’étaient guère en rapport avec les vœux monastiques. Saint Bernard s’était élevé avec énergie contre les abus qui déjà de son temps lui semblaient devoir amener promptement la décadence des ordres, et sorti de Cîteaux, il avait cherché à rendre à la règle de Saint-Benoît sa pureté primitive, avec une constance et une rigueur de principes qui eurent un plein succès tant qu’il vécut. De son temps la vie monacale conquit une immense influence morale, et s’étendit jusque dans les camps par l’institution et le développement des ordres militaires. Il n’y avait pas alors de famille princière qui n’eût des représentants dans les différents monastères de l’Occident, et la plupart des abbés étaient de race noble. L’institut monastique tenait la tête de la civilisation.

Du jour où le pouvoir royal se fut constitué, où la France eut un véritable gouvernement, ces petites républiques religieuses perdirent peu à peu de leur importance ; et renfermées dans leurs devoirs de religieux, de propriétaires fonciers, de corps enseignant, l’activité qu’elles avaient déployée au dehors pendant les XIe et XIIe siècles ne trouvant plus une pâture suffisante, se perdit en querelles intestines, au grand détriment de l’institut tout entier. La noblesse fournit tous les jours un contingent moins nom-

  1. Voir la notice de M. Hérard sur cette abbaye. Paris, 1851, et le curieux travail graphique de cet architecte, déposé aux archives des Monuments hist. minist. d’État. Le chemin de fer de Creil passe aujourd’hui à travers les enclos de l’abbaye.