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est vaseuse, tandis que la rive gauche donne un bon sol, dès lors le cloître devant être forcément entre l’église et ce cours d’eau, ne pouvait être bâti qu’au nord de la nef. D’ailleurs, le climat est beaucoup moins rude à Pontigny qu’à Clairvaux et Cîteaux, et l’orientation méridionale du cloître était moins nécessaire. B est l’oratoire primitif qui avait été conservé ; D la salle du chapitre ; E le grand réfectoire ; F la cuisine et ses dépendances avec sa petite cour séparée sur le cours d’eau ; G le chauffoir ; H le noviciat ; I les pressoirs ; K la sacristie ; L des granges avec les logements des frères convers à proximité, en dehors de la clôture des religieux, comme à Cîteaux et à Clairvaux. Le logement de l’abbé et des hôtes, ainsi que les dépendances étaient à l’ouest proche de la première entrée du monastère. M la chapelle de Saint-Thomas Becket qui fut, comme chacun sait, obligé de se réfugier à Pontigny. Un grand bassin aux ablutions était placé au milieu du cloître. De vastes jardins entouraient cet établissement, et s’étendaient à l’est de l’église.

Comparativement à Cîteaux et à Clairvaux, Pontigny est un monastère de second ordre, et cependant sa filiation s’étendait en France, en Italie, en Hongrie, en Pologne et en Angleterre ; trente maisons étaient placées sous sa juridiction, toutes fondées de 1119 à 1230. Parmi ces maisons nous citerons celles de Condom, de Châlis, du Pin, de Cercamp, de Saint-Léonard en France ; de San-Sebastiano, de Saint-Martin de Viterbe en Italie ; de Sainte-Croix, de Zam, de Kiers en Hongrie, etc., etc.

Il ne paraît pas que l’abbaye de Pontigny ait jamais été entourée de fortes murailles comme sa mère Cîteaux, et ses sœurs Clairvaux et Morimond ; c’était là un établissement presque exclusivement agricole, nous n’y trouvons plus ce petit cloître réservé aux travaux littéraires ; pas d’école, pas de cellules pour les copistes, pas de grande bibliothèque. Les moines de Pontigny, en effet, convertirent bientôt la vallée déserte et marécageuse où ils s’étaient établis en un riche territoire qui est devenu l’une des vallées les plus fertiles de l’Auxois ; ils possédaient 2 895 arpents de bois, ils avaient planté des vignes à Châblis, à Pontigny, à Saint-Bris ; entretenaient 40 arpents de beaux prés, trois moulins, une tuilerie, et de nombreux domaines[1].

Comme Pontigny, l’abbaye des Vaux-de-Sernay dans le diocèse de Paris était un établissement purement agricole ; fondé en 1128 (9), il n’avait pas l’importance des établissements de Clairvaux, de Morimond, de Pontigny, mais on trouve dans ce plan la simplicité d’ordonnance et la régularité des édifices enfantés par Cîteaux ; toujours les quatre chapelles ouvertes à l’est dans le transsept, et comme à Cîteaux une abside carrée. En A est l’église ; en B le cloître ; en C le réfectoire, disposé perpendiculairement au cloître conformément au plan de Cîteaux et contrairement aux usages monastiques adoptés par les autres règles. La cuisine et le chauffoir étaient à proximité.

  1. L’église de Pontigny et la grange à l’entrée sont encore conservées ; cette église, quoique d’une simplicité un peu puritaine, ne laisse pas d’être fort belle ; nous ne savons s’il a jamais existé un clocher sur le transsept ; il n’en reste plus de traces.