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édifices romans par d’élégantes constructions élevées avec une rapidité prodigieuse. Les évêques étaient à la tête de ce mouvement et faisaient, dans toutes les provinces du nord, rebâtir leurs cathédrales sur de nouveaux plans que l’on venait modifier et amplifier encore à peine achevées. Les grandes cathédrales élevées de 1160 à 1240, n’étaient pourvues de chapelles qu’au chevet. Les nefs, ainsi que nous l’avons dit plus haut, n’étaient accompagnées que de collatéraux doubles ou simples. La cathédrale de Paris, entre autres, était dépourvue de chapelles même au rond-point probablement ; celles de Bourges et de Chartres n’ont que de petites chapelles absidales pouvant à peine contenir un autel. En 1230 la cathédrale de Paris était achevée (voy. Cathédrale), et en 1240 déjà on crevait les murs des bas côtés de la nef pour établir des chapelles éclairées par de larges fenêtres à meneaux entre les saillies des contre-forts. Cette opération était continuée vers 1260 sur les côtés parallèles du chœur, les deux pignons du transsept étaient entièrement reconstruits avec roses et claires-voies au-dessous, les fenêtres supérieures de la nef et du chœur élargies et allongées jusqu’au-dessus des archivoltes de la galerie de premier étage ; par suite, les voûtes de cette galerie modifiées, et enfin au commencement du XIVe siècle on établissait de grandes chapelles tout autour du rond-point. Tel était alors le désir de satisfaire aux besoins et aux goûts du moment, que l’on n’hésitait pas à reprendre de fond en comble un immense édifice tout neuf, pour le mettre en harmonie avec les dernières dispositions adoptées. Toutefois la construction des chapelles de la nef de la cathédrale de Paris, devance de beaucoup l’adoption de ce parti dans les autres églises du domaine royal. À Reims, la nef, dont la partie antérieure date de 1250 environ, n’a pas de chapelles ; à Amiens on ne les établit que pendant le XIVe siècle ; à cette époque on n’admettait plus guère de bas côtés sans chapelles, les plans des nefs des cathédrales de Clermont-Ferrand, de Limoges, de Narbonne, de Troyes, ont été conçus avec des chapelles. Ceux des cathédrales de Laon, de Rouen, de Coutances, de Sens, sont modifiés pour en recevoir, de 1300 à 1350.

Les nefs des églises appartenant à la règle de Cluny étaient précédées d’une avant-nef ou porche fermé, ayant une très-grande importance, comme à Vézelay, à la Charité-sur-Loire, à Cluny même, ces porches étaient surmontés de deux tours ; quatre tours accompagnaient en outre les deux croisillons du transsept, et un clocher central couronnait la croisée. Cette disposition, qui date du XIIe siècle, n’est pas adoptée dans les églises de la règle de Cîteaux ; les nefs ne sont précédées que d’un porche bas, fermé aussi, mais peu profond ; le pignon de la façade n’est pas flanqué de tours, non plus que les bras de la croisée ; une seule flèche s’élève sur le milieu du transsept ; ainsi étaient les églises de Clairvaux, de Fontenay, de Morimond, de Pontigny, etc. Ce luxe de tours ne pouvait convenir à l’austérité de la règle de Cîteaux : les religieux de cet ordre n’admettaient que le strict nécessaire ; un seul clocher sur le milieu de l’église devait suffire aux besoins du monastère (voy. Architecture Monas-