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chaux hydraulique. Il y a en effet deux natures principales de chaux : la chaux dite grasse et la chaux hydraulique ; la première est obtenue par la cuisson de calcaires compactes que l’on trouve habituellement au sommet des bancs ; on l’appelle grasse parce qu’elle est glutineuse lorsqu’elle est éteinte et s’attache au rabot avec lequel on la corroie ; cette chaux, étant noyée dans l’eau, bout et jette une épaisse vapeur, comme vous avez pu voir, et, mêlée au sable, prend lentement. Employés au-dessus du sol, les mortiers faits avec cette chaux deviennent fort durs à la longue, mais conservent plus ou moins pendant un temps une certaine plasticité. Toutefois ces mortiers, prenant lentement, sont facilement délayés par les eaux, et ne peuvent alors jamais devenir durs. Les chaux hydrauliques obtenues par la cuisson de calcaires argileux, mêlées au sable, prennent au contraire rapidement une grande dureté et se maintiennent d’autant mieux que les mortiers sont dans des lieux humides. Aussi appelle-t-on cette chaux hydraulique parce qu’on l’emploie pour toutes les maçonneries que l’on établit dans l’eau. On fait des chaux hydrauliques factices quand le sol ne fournit pas des calcaires argileux, en broyant une certaine quantité d’argile avec les calcaires propres à faire de la chaux ordinaire. On reconnaît la chaux hydraulique en l’éteignant, c’est-à-dire en la mêlant avec de l’eau ; alors elle fuse sans presque produire de vapeur.

C’est avec la chaux hydraulique qu’on fait les bétons dont je vous parlais hier. Ayant préparé le mortier, on y mêle une certaine quantité de cailloux durs, de la grosseur d’un œuf environ ; on corroie le tout et on jette le mélange dans les fouilles où on le pilonne avec des dames de bois. Si la chaux est bonne et que le béton soit bien fait, on compose ainsi un véritable rocher qui ressemble aux conglomérats où poudingues produits naturellement. L’eau traversant difficilement ces bétons lorsqu’ils ont pris de la