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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

d’Olympie, ni de ces fêtes romaines qu’il avait sous les yeux. Un salut d’allégresse à l’ami longtemps exilé qu’il revoit, un adieu plus tendre à l’ami qui s’éloigne, une consolation au malheur, un conseil à la prospérité, un éloge, une plainte, un lieu commun de prudence mondaine, sont pour cet heureux génie autant d’inspirations originales. Créateur de l’ode philosophique sans théâtre et sans appareil, inventeur d’une poésie concise comme la pensée, brillante comme la passion, il a trouvé ce qui charmera toujours les esprits délicats, quels que soient les changements extérieurs du monde. Il a touché le fond du cœur de l’homme, non par les plus grands côtés, il est vrai, mais par des points sensibles qui ne peuvent s’effacer. Assez ami du courage et de la vertu, par imagination au moins, ami plus efficace du bon sens, du désintéressement, des désirs modérés, il représente la moyenne de l’humanité, et par là peut-être il instruit mieux qu’un précepteur plus sévère.

Sans doute, en écartant des poésies lyriques d’Horace ce que le temps a convaincu de mensonge, ce qui blesse la pudeur, ce qui touche moins la raison que les sens, on réduit beaucoup ce précieux écrin de purs et limpides diamants, trésor de l’art hellénique retravaillé par le génie romain. Mais il ne reste rien que d’exquis pour le goût et la vivacité des couleurs : il n’y manquerait pas même l’enthousiasme, le mens divinior, ce qu’Horace de-