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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

majestueuse et sainte. « Sophocle, dit un scoliaste, avait écrit des élégies et des péans, et une dissertation sur l’emploi du chœur, dans laquelle il contredisait Thespis et Chérile. » Cela même indique qu’il ne blâmait pas l’élévation lyrique d’Eschyle, bien qu’ailleurs il ait témoigné l’intention de ne pas suivre la hardiesse de ses plans et le caractère de son style.

Quoi qu’il en soit, un autre souvenir rapide, jeté par Plularque, nous laisse un regret. Sophocle avait fait une ode adressée à Hérodote, sans doute l’immortel historien, celui dont les récits lus à Olympie excitaient les larmes jalouses du jeune Thucydide. Quel intérêt n’aurait pas pour nous, postérité lointaine, un témoignage décerné à l’historien Hérodote par ce même Sophocle, dont Thucydide a cité le nom dans les incidents de la guerre du Péloponèse, sans paraître même penser à son génie poétique !

Aujourd’hui, à travers les débris du temps, le poëte seul a survécu pour nous ; et sept drames conservés lui font une immortelle couronne. On sait ce que fut pour l’antiquité le génie dramatique de Sophocle :

Sola Sophocleo tua carmina digna cothurno.

C’est la perfection du naturel et de l’art, la grandeur simple et la pureté sublime. Par là, Sophocle étonne moins qu’Eschyle, sans être moins créateur et moins original. S’il en est ainsi dans le dialogue, cela est encore plus vrai du génie lyrique des deux poëtes. Toute-