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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

desquels se retira plus tard le poëte Eschyle, Pindare ne les loua que de leurs vertus, et au profit du commun salut de la Grèce, dont ces rois défendaient aussi la cause contre d’autres barbares alliés de la Perse.

« J’ai sous le bras, dans mon carquois, » dit-il avec sa forme originale, « bien des traits qui parlent aux intelligences, mais qui, pour la foule, ont besoin d’interprètes. —[1] Tends ton arc vers le but, ô mon âme ! Qui frapperons-nous de ces flèches étincelantes, dardées d’un cœur ému ? Visant d’abord Agrigente, je ferai d’une âme sincère le serment que, depuis cent années, cette ville n’a pas vu homme d’un cœur plus bienfaisant et d’une main plus libérale que Théron. L’orgueil cependant s’est élevé contre sa louange, lui faisant obstacle sans justice, et voulant par des bouches insensées avoir parlé, et attacher ainsi quelque tare secrète aux vertus des bons. Mais, puisque le sable des mers échappe au calcul, qui pourrait dénombrer combien de joies cet homme a données aux autres hommes ? »

Voilà, certes, une belle et touchante image de la royauté ! et Voltaire, à Potsdam, aurait pu la citer à Frédéric, que tout bas il accusait de rappeler Denys de Syracuse, à double titre de despote et de mauvais poëte. Mais l’antiquité était peu comptée alors. Voltaire, qui, selon notre savant ami, le traducteur de

  1. Pind., ed. Boiss. Olymp. II, p. 33.

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