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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

hormis Suidas, ne confirment-ils pas l’opinion si vraisemblable que le génie dorien de Pindare ne fut pas appelé à cette gloire nouvelle du théâtre, ouverte dans Athènes, et qu’il trouva plus près de lui, à Delphes, à Olympie, la seule inspiration qui, sur des tons variés, domina son génie ?

Si on songe, d’ailleurs, à cette orchestique, ou danse mêlée de chants, qui formait une des représentations de la scène antique, et si d’autre part on remarque, dans la liste non contestée des chants du poëte thébain, un ordre de poésies lié, sous le nom d’Hyporchèmes, aux danses religieuses et guerrières, on concevra sans peine que, dans la critique indigeste de Suidas, ce titre ait pu se confondre avec l’idée du drame orchestique, et que la mention en ait ainsi créé, par double emploi, un théâtre de Pindare dont l’antiquité n’avait pas ouï parler.

L’hypothèse contraire, fût-elle moins dénuée de témoignages, serait peu vraisemblable. Dans ces beaux jours du génie des Hellènes, à ce second âge, c’est-à-dire à cette pleine jeunesse d’une poésie déjà savante, mais surtout naturelle et passionnée, le poëte n’aspirait pas à l’universalité, à la primauté dans les genres divers.

En même temps que poëte, il pouvait être guerrier de terre et de mer comme Eschyle ou Sophocle, par la condition générale du dévouement à la patrie ; mais, d’ordinaire, il n’était poëte que dans une seule des