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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

autre, ce qui se rapporte à l’opinion, à la croyance, τὰ πρὸς δόξαν.

Sous ces deux titres on peut concevoir ce que, bien des siècles plus tard, et dans une science toute formée des traditions grecques, nous retrouvons sous la plume de Varron, divisant la théologie en mythologique, naturelle, et civile : « La première, ajoutait-il, faite pour le théâtre, la seconde pour l’univers, la troisième pour Rome. »

Il paraît, d’après les courtes analyses de Saint Augustin, que Varron touchait dans sa seconde théologie à cet antique panthéisme, à cette idée d’une nature éternellement vivante et par là divine, qui semble le fondement des cultes antiques de l’Inde. Une interprétation semblable était-elle déjà cette vérité première, que Parménide avait prétendu célébrer, par opposition aux croyances humaines ? Ou plutôt de la contemplation de la nature n’avait-il pas détaché le principe d’un Dieu tout spirituel, d’une intelligence absolue et suprême ? On ne saurait avoir de doute à cet égard. Parménide a pu pécher, comme Berkeley, par excès d’idéalisme. Il a pu croire aux idées plus qu’à la matière et ramener le doute par sa foi trop vive à l’abstraction. Mais cela même atteste un ordre d’élévation intellectuelle et mystique lié de près à la poésie, et que nous retrouvons à différents âges de l’esprit humain. Un premier fragment conservé de Parménide nous semble marqué de ce caractère.