Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/115

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
107
ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

l’auteur ou peut-être par les altérations de l’usage et du temps, cette variété de dialectes dont Homère avait usé pour parler à toute la Grèce, et que, dans une autre société, reproduisit le Dante pour parler à toute l’Italie.

Apparemment ce premier lyrique de Sparte, tout en fortifiant de l’accent laconien les sons qu’il apportait de la côte d’Asie, ne dominait pas assez pour imposer sa diction à la Grèce. À Pindare seul devait appartenir de faire de son dialecte thébain la langue de la poésie lyrique, comme le théâtre et la tribune d’Athènes feraient de leur dialecte la langue du drame et de l’éloquence.

Ce feu de poésie, que n’avait pas éteint la sévère discipline de Lacédémone, rayonnait de tous les rivages de la Grèce. Quelle est celle de ses îles, baignées par la brillante mer d’Ionie, qui n’ait pas eu son poëte comme elle avait ses théories et ses concerts ? Chios, Délos, Lesbos, étaient autant de cités poétiques dans la commune patrie. Les fables même qu’on en raconte attestent un fond de vérité dans le génie attribué dès lors à toutes les variétés du nom grec.

Que le poëte Alcman, naturalisé à Sparte, ait eu à Lesbos un disciple dont l’harmonie merveilleuse, sans attendrir les pirates, enchantait jusqu’aux dauphins des mers, c’est un récit aussi gracieux dans les pages d’Hérodote que douteux en lui-même ; mais la tradition lyrique dans la Grèce est certaine du moins ; et, soit Arion, soit Amphion, jusqu’aux fables, tout dépose