Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/111

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
103
ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

sa vie et dans son art ; ou bien il faut supposer que, son nom étant devenu célèbre, on le chargea dans les siècles suivants de vers qui ne lui appartenaient pas.

Quoi qu’il en soit, Sparte, loin de châtier la licence de quelques-uns de ces vers avec la sévérité dont elle punit l’insolente lâcheté d’Archiloque, honora le poëte lydien qui adaptait sa lyre aux mâles accents du langage laconien. Elle se souvint que Lycurgue avait recueilli les poëmes homériques, malgré les peintures gracieuses qui s’y mêlent à l’horreur des combats, et qu’il avait fait régler dans sa ville le chant et l’harmonie par un musicien de l’île de Crète. Elle y ajouta les grâces nouvelles d’Alcman.

Cette poésie lyrique d’Alcman, là où, perdant sa teinte originelle d’Asie, elle était devenue toute laconienne, semble du reste avoir été grave et calme comme le son de la flûte[1], qui, chez les Crétois et les Spartiates, réglait même les mouvements impétueux du combat. Ce caractère devait être surtout marqué dans les sujets qui s’y prêtaient d’eux-mêmes, dans les hymnes de reconnaissance aux dieux, les Péans, les Prosodies, les Parthénies. On ne peut en juger assez par quelques vers que le hasard nous a transmis ; mais la conjecture est vraisemblable.

Comme la contemplation de la nature est une des choses qui répondent le mieux à cette paix de l’âme et à

  1. Plutarch. Mor. De Mus., p. 1393.