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La vie de Henriette

difficulté. Il ſe jetta à mes genoux : fit mille extravagances, & quoy que je luy euſſe répondu qu’un reſte de tendreſſe & de reſpect, que l’habitude retenoit dans mon cœur, eſtoit la ſeule choſe qui m’empeſchoit de me venger de ſes inſolences, il ne laiſſa point de les continüer, juſques à vouloir en venir à la force ; Ce fut alors que j’entray en furie, je me démeſlay de ſes bras, je courus à mon cheval, je pris un piſtolet à larçon de la Selle & le menaçay de le tuër, s’il ne me laiſſoit : Il n’en fit rien, & au contraire ſa brutalité ſe changeant en fureur, je le vis venir à moy comme un ſatyre, en jurant qu’il ſe ſatisferoit ; Je laſchay le piſtolet qui le bleſſa de deux bales dans le corps : Voilà, Madame, qu’elles furent mes premieres cruautez.

Cependant, l’embarras eſtoit conſiderable pour une fille de mon âge, de ſe voir ſeule dans un bois,