Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Après avoir payé mon tribut à leurs mânes, je remontai vers le mausolée qui me servoit de phare, et j’y reconnus enfin la dernière demeure d’un de nos guerriers les plus vertueux et les plus illustres. La renommée de Pérignon touche au berceau de la révolution françoise, à cette époque où tant de plébéiens, repoussés par nos lois des honneurs de l’armée, montrèrent à une aristocratie dédaigneuse qu’ils étoient dignes comme elle des regards de l’histoire, et que la valeur et le talent militaire n’étoient point l’apanage exclusif d’une classe privilégiée.


Cette erreur parmi nous a trop long-temps régné.
Fabert et Catinat l’avoient en vain flétrie,
Le soldat, dont le sang couloit pour la patrie,
Mouroit obscur et dédaigné.
De cet indigne abus le siècle a fait justice.
Ces honneurs, que l’orgueil déroboit au caprice,
Du mérite illustré sont devenus le prix.
Tout François a prouvé, dans les nobles arènes,
Que le sang des héros circuloit dans ses veines.
Dans les champs de Fleurus, d’Arcole et d’Austerlitz
Leurs titres sont gravés en sanglants caractères ;
Et la Charte d’un roi, plus sage que ses pères,
A consacré les droits qu’ils avoient reconquis.