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CHAPITRE HUITIÈME


PARTIE OCCIDENTALE DU BASSIN PARISIEN
NORMANDIE


I. ÉVOLUTION GÉOLOGIQUE DE LA RÉGION. || II. POSITION. || III. LE PAYS DE CAUX. || IV. VALLÉES NORMANDES. || V. VALLÉE ET BAIE DE LA SEINE. || VI. INFLUENCES DU LITTORAL. || VII. L’ÉTAT NORMAND.


I. ÉVOLUTION GÉOLOGIQUE DE LA RÉGION

LE BASSIN parisien est, à l’Ouest, tranché brusquement par la mer. Successivement, de la Picardie aux schistes du Cotentin, les formations de plus en plus anciennes dont il se compose : craie blanche, argile et sables de la base de la craie, calcaires jurassiques, marnes du lias, se remplacent à la surface. Elles se dessinent avec netteté, chacune avec son aspect propre, dans la topographie, et s’appellent le Pays de Caux, la Vallée d’Auge, la Campagne de Caen, le Bessin. Mais le moment où elles viennent de s’étaler à la surface est aussi celui où elles sont interrompues par la mer. Sur le plateau crayeux du Pays de Caux cette rupture a quelque chose de saisissant. Les champs touchent au tranchant des falaises, le sillon se continue presque jusqu’au bord ; la plupart des vallées se terminent, suspendues à moitié hauteur, sans se raccorder avec le rivage qu’elles dominent d’une cinquantaine de mètres, parfois davantage. Il est clair que lorsque le profil normal des vallées s’est fixé, la côte était plus éloignée; un accident ultérieur a fait disparaître le raccordement avec le niveau de base[1].

  1. En accord avec ces indices, on a constate qu’au large de l’embouchure de la Seine les lignes bathymétriques accusaient un prolongement sous-marin de la vallée. Sur les côtes du Calvados, des tourbières, aujourd’hui sous la mer, attestent, pour l’époque où elles se sont formées, une plus grande extension des terres. On est ainsi amené à assigner une date récente à la ligne actuelle du littoral normand. A une époque où peut-être l’homme occupait déjà ces régions, les terres se prolongeaient vers le fond d’un golfe occupant le grand axe de la dépression de la Manche Celle-ci se creusait entre les ailes relevées d’un synclinal, dont la continuité subsiste encore, puisque les couches se correspondent de la rive française à la rive anglaise.