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Le destin change toutes choses :
Mon amitié tant seulement,
Vos beaux lys et vos belles roses,
Dureront éternellement.


ODE.


Enfin mon amitié se lasse :
Je suis forcé de me guérir.
L’amour qui me faisoit périr
Tous les jours peu à peu se passe.
J’ay rappelle mon jugement,
J’ay fait vœu d aymer sagement.
Je rougis de ma servitude
Et proteste devant les Dieux
Que je hay ton ingratitude
Plus que je n’ay chery tes yeux.
Je n’ay plus le soing de te plaire :
Mes charmes sont esvanouys ;
Désormais je me resjouys
De ta haine et de ta colère.
Geste lascheté d’endurer
Ne me sçauroit guère durer ;
Je veux estre exempt de souffrance
Aussi bien que toy de pitié.
Et vivre avec l’indifférence
Dont tu traictes mon amitié.
Jamais douleur insupportable
Jusques à mon mal n’empira,
Jamais esprit ne souspira
D’un travail si peu profitable.
Je vis trop amoureusement,