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S’il est propre à l’estude, il parle des combats.
Je croy que les destins ne font venir personne
En l’estre des mortels qui n’ayt l’ame assez bonne ;
Mais on la vient corrompre, et le céleste feu
Qui luit à la raison ne nous dure que peu :
Car l’imitation rompt nostre bonne trame,
Et tousjours chez autrui fait demeurer nostre ame.
Je pense que chacun auroit assez d’esprit,
Suyvant le libre train que nature prescrit.
A qui ne sçait farder ny le cœur ny la face,
L’impertinence mesme a souvent bonne grâce.
Qui suyvra son génie et gardera sa foy,
Pour vivre bien-heureux, il vivra comme moy.


SECONDE SATYRE.


Cognois-tu ce fascheux qui contre la fortune
Aboyé impudemment comme un chien à la lune.
Et qui voudroit, ce semble, en destourner le cours
Par l’importunité d’un outrageux discours ?
D’une sotte malice en son ame il s’afflige
Quand la faveur du roy ses favoris oblige.
Un homme dont le nom est à peine cogneu,
D’un pays estranger nouvellement venu,
Que la fortune aveugle, en promenant sa roue,
Tira sans y penser d’une ornière de boue,
Malgré toute l’envie au dessus du malheur,
D’un crédit insolent gourmande la valeur.
Et nous le permettons ! Et le François endure
Qu’à ses propres despens ceste grandeur luy dure !
Nos princes autrefois estoient bien plus hardis :
Où se cache aujourd’huy la vertu de jadis ?
Apprends, malicieux, comme tu sais mal vivre,