Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 1.djvu/320

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Oy comme ils ont changé de notte !

Approche, approche, ma Driade !
Icy murmureront les eaux,
Icy les amoureux oyseaux
Chanteront une serenade.

Preste-moy ton sein pour y boire
Des odeurs qui m’embasmeront ;
Ainsi mes sens se pasmeront
Dans les lacs de tes bras d’yvoire.

Je baigneray mes mains folastres
Dans les ondes de tes cheveux,
Et ta beauté prendra les vœux
De mes œillades idolatres.

Ne crains rien, Cupidon nous garde.
Mon petit ange, es-tu pas mien ?
Ha ! Je voy que tu m’aymes bien :
Tu rougis quand je te regarde.

Dieux ! que ceste façon timide
Est puissante sur mes esprits !
Regnauld ne fut pas mieux espris
Par les charmes de son Armide.

Ma Corine, que je t’embrasse !
Personne ne nous voit qu’Amour ;
Voy que mesme les yeux du jour
Ne trouvent point icy de place.

Les vents, qui ne se peuvent taire,
Ne peuvent escouter aussy,
Et ce que nous ferons icy
Leur est un inconnu mystere.