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Et les visites des mortels
Ne troublent point ces solitudes.

Ceste forest n’est point profane ;
Ce ne fut point sans la fascher
Qu’Amour y vint jadis cacher
Le berger qu’enseignoit Diane.

Amour pouvoit par innocence,
Comme enfant, tendre icy des rets,
Et comme reine des forests,
Diane avait cette licence.

Cupidon, d’une douce flamme
Ouvrant la nuict de ce valon,
Mist devant les yeux d’Apollon
Le garçon qu’il avoit dans l’ame.

À l’ombrage de ce bois sombre
Hyacinthe se retira,
Et depuis le Soleil jura
Qu’il seroit ennemy de l’ombre.

Tout auprès le jaloux Borée,
Pressé d’un amoureux tourment,
Fut la mort de ce jeune amant,
Encore par luy souspirée.

Saincte forest, ma confidente,
Je jure par le Dieu du jour
Que je n’auray jamais amour
Qui ne te soit toute evidente.

Mon ange ira par cet ombrage ;
Le Soleil, le voyant venir,
Ressentira du souvenir
L’accez de sa premiere rage.

Corine, je te prie, approche ;
Couchons-nous sur ce tapis vert,
Et pour estre mieux à couvert,
Entrons au creux de cette roche.

Ouvre tes yeux, je te supplie :