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dissencion entre le roy d’Angleterre et ses barons, pour l’occasion d’un chevalier qui estoit appellé Pierre de Gavastonne[1], lequel Pierre avoit pieça esté bani du royaume d’Angleterre, si comme l’en disoit. Mais le roy l’avoit pris à si grant amour qu’il li avoit donné la conté de Lincoliense a droit heritage. Et à la suggestion dudit Pierre, s’efforçoit le roy de faire moult de nouvelletez contre la volenté de touz et contre la coustume du pays et au prejudice du royaume. Si avint tant que pour l’occasion des choses devant dictes, comme pour sa simplesce et fatuité, qu’il le pristrent en telle haine non pas seulement de le guerroier, mais le priver de l’administracion du roiaume, se ce n’eust esté pour l’amour du roy de France duquel il avoit espousée la fille, et aussi pour l’amour de la royne, laquelle estoit moult amée des barons et des nobles du pays.

Et en ycest an, les Hospitaliers, avec grant compaignie de crestiens, passerent en l’ille de Rodes[2], de laquelle les crestiens avoient esté enchaciez par les Sarrazins ; en laquelle ille il se porterent à leur très grant loenge, et y firent moult de bons fais contre les Sarrazins.

  1. Pierre de Gaveston, comte de Cornouailles, fils d’un chevalier gascon, favori d’Édouard II, fut décapité le 19 juin 1312. Sur les événements auxquels les Grandes Chroniques font allusion, voir Thomas Walsingham, Historia anglicana, éd. Th. Riley, t. I, p. 121 à 126.
  2. Ce fut en 1310 que les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem s’établirent dans l’île de Rhodes.